LES DEVOIRS DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

20 mars 2024 | 0 commentaires

Au moment où nous nous acheminons vers l’élection du Président de la République qui devrait, de 2024 à 2029, être le Chef de l’État du Sénégal, personne morale, délégataire du « Peuple souverain », il nous a semblé utile de visiter la Constitution et les Instruments internationaux pour dégager les devoirs et obligations de cette autorité qui sera le Chef de tous les leaders au service de l’État, et qui pour cela, devra disposer de toutes les vertus et qualités attendues d’un bon dirigeant. Parmi ces vertus et qualités, il y a notamment, l’exemplarité, un esprit de justice et d’équité et un amour de la vérité, de la patrie (patriotisme) et du peuple, avec une attention particulière pour les plus faibles, les plus vulnérables, les plus pauvres et les plus défavorisés.

Cet article sera articulé autour des points suivants : D’abord, des Généralités (I.) ; les termes du serment et les attributions constitutionnelles du Président de la République (II.) ; les obligations du Président de la République émanant des grandes orientations données par le peuple souverain dans le Préambule de la Constitution (III.) ; les devoirs de l’État ou du Chef de cet État qui émanent du Titre premier de la Constitution : de l’État et de la souveraineté (IV.), et l’apport de l’analyse des serments des Présidents de la République de cinq (5) pays africains dans la compréhension des devoirs du Chef de l’État du Sénégal (V.).

I.  GÉNÉRALITÉS

L’État, personne morale délégataire du Peuple souverain, exerce une autorité sur tous les citoyens et sur toutes les composantes de la Nation et doit conséquemment exercer au travers de ceux qui le font vivre, et au premier rang desquels le Président de la République, un leadership qui est aussi celui du Président de la République qui, en tant que responsable de la Communauté nationale, a constitutionnellement la haute charge de conduire le pays vers des lendemains meilleurs, en rapport avec toutes les composantes de la Nation: « collectivités territoriales », « partis politiques », « organes de presse », « associations », « groupements économiques, culturels et sociaux », « sociétés », « familles », « institutions et communautés religieuses », « communautés non religieuses », « institutions nationales, publiques ou privées en charge de l’éducation et de l’ alphabétisation », etc.

Il importe conséquemment que les leaders étatiques, au premier rang desquels le Président de la République (PR), aient une bonne connaissance des devoirs de cette personne morale afin de pouvoir participer efficacement au développement des cadres légaux (lois et règlements) de l’organisation et du fonctionnement synergique de tous ses Organes qui se partagent les charges que commande l’accomplissement de ces devoirs.

La qualité de l’exercice du leadership de l’État ou sa capacité, à mobiliser tous ses serviteurs et les forces vives de la Nation, pour l’optimisation de ses performances dans la poursuite du bonheur du peuple et de la construction du « Meilleur Sénégal Possible » pour les générations futures,  dépend de l’aptitude de ses serviteurs, sous la conduite du Président de la République qui prête serment avant d’entrer en fonction, à s’identifier à lui et à agir vertueusement et efficacement afin qu’il (l’État) puisse remplir de la meilleure manière possible la totalité de ses devoirs, émanant de la Constitution ou des instruments internationaux, qu’ils soient propres ou liés aux droits du peuple et des citoyens.

II. LES TERMES DU SERMENT ET LES ATTRIBUTIONS CONSTITUTIONNELLES DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

L’Article 37 de la Constitution du 22 janvier 2001, plusieurs fois modifiée, donne les termes dans lesquels le serment est prêté: «Devant Dieu et devant la Nation sénégalaise, je jure de remplir fidèlement la charge de Président de la République du Sénégal, d’observer comme de faire observer scrupuleusement les dispositions de la Constitution et des lois, de consacrer toutes mes forces à défendre les institutions constitutionnelles, l’intégrité du territoire et l’indépendance nationale, de ne ménager enfin aucun effort pour la réalisation de l’unité africaine».

La charge de Président de la République est globalisante et renferme notamment le fait d’«observer et faire observer scrupuleusement les dispositions de la Constitution et des lois»; «de consacrer toutes ses forces à défendre les institutions constitutionnelles, l’intégrité du territoire et l’indépendance nationale», et « de ne ménager aucun effort pour la réalisation de l’unité africaine », ainsi que ses attributions propres données expressément par la Constitution notamment au travers des articles, 42 à 52 du « Titre III (Du Président de la République), 54 du Titre IV (Du gouvernement),  72 à 74 du Titre VII (Des rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif), 87-1, 89 et 90 du Titre VII.1 (Du conseil économique, social et environnemental). Nous renvoyons le lecteur à ces articles.

Pour le Chef de l’État, remplir fidèlement la charge de Président de la République c’est exécuter rigoureusement les trois grandes missions contenues dans le serment et ses attributions constitutionnelles portées essentiellement par les articles susmentionnés, c’est aussi exécuter ou faire exécuter tous les devoirs qu’impose le respect des grandes orientations données par le peuple au travers du Préambule de la Constitution, c’est enfin assumer ou faire assumer tous les devoirs de l’État qui lui sont expressément attribués et ceux induits par les droits du peuple et des citoyens sénégalais consacrés par la Constitution et par les instruments internationaux dont les plus importants sont la Charte Africaine des droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) et la Charte internationale des droits de l’Homme composée de la Déclaration Universelle des droits de l’homme de 1948 (DUDH), du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP).

III. LES GRANDES ORIENTATIONS DONNÉES PAR LE PEUPLE SOUVERAIN

Pour obtenir un meilleur aperçu des obligations et devoirs du Chef de cet État, délégataire du « Peuple souverain », il importe d’analyser le Préambule de la Constitution qui définit « ce à quoi le Peuple est attaché », « ses convictions », « ses considérations», « ses consciences », « ses affirmations » et « ses proclamations », étant donné que les politiques publiques définies par le Président de la République doivent s’inscrire dans les grandes orientations qui y sont données par le « Peuple souverain », en vue de l’atteinte de « l’objectif final » qui est invariablement le bonheur des populations.

Nous partageons ci-dessous les devoirs du Chef de l’État induits par ces grandes orientations :

1. Le Peuple est « profondément attaché à ses valeurs culturelles fondamentales qui constituent le ciment de l’unité nationale. »

Donc il importe que le PR, en tant que premier responsable de la santé morale du peuple, agisse pour sauvegarder et promouvoir ces valeurs et y enraciner les populations. Il doit conséquemment faire de la lutte contre la crise morale une sur-priorité.

2. Le peuple est « convaincu de la volonté de tous les citoyens, hommes et femmes, d’assumer un destin commun par la solidarité, le travail et l’engagement patriotique. »

Donc le PR doit prendre des actes pour éduquer les citoyens et les mobiliser dans le cadre de l’institution d’un culte de la « solidarité, du travail, de l’engagement patriotique », de l’honneur et du mérite, afin de construire le meilleur « destin commun » possible, lié à l’avènement d’une vraie indépendance, condition sine qua non de l’optimisation du bonheur auquel les citoyens ont droit. Cependant développer le sentiment patriotique et l’esprit de solidarité ne se décrète pas, il se montre. Il faut à cet effet que les autorités de commandement et de direction et les gouvernants, au premier rang desquels, le PR, soient des exemples par leur patriotisme qui commandent notamment le désintéressement, l’acceptation inconditionnelle de la primauté de l’intérêt général, l’amour des plus démunis et le rejet des égoïsmes, des accaparements, de la corruption et de la gabegie.

3. Le peuple « considère que la construction nationale repose sur la liberté individuelle et le respect de la personne humaine, sources de créativité » et proclame « le respect des libertés fondamentales et des droits du citoyen comme base de la société sénégalaise ».

Dès lors, le PR doit, tout mettre en œuvre pour que l’État rende effectifs les libertés et droits constitutionnellement reconnus aux citoyens, et que ces derniers soient conscients du fait que la jouissance de ces droits et libertés commande aussi un respect scrupuleux de leurs devoirs, envers toutes les personnes physiques et morales, définis par la même Constitution, et qu’ils doivent mettre à profit cette protection pour optimiser leur contribution au bien-être collectif et à la consolidation de la souveraineté du peuple qui ne peut être totale sans une vraie indépendance. Voir point 8. ci-dessous.

4. Le peuple est « conscient de la nécessité d’affirmer et de consolider les fondements de la Nation et de l’État ».

Dès lors l’État, sous la conduite du PR, doit faire preuve de suffisamment d’autorité et de capacité de dissuasion et de prévention pour identifier, par un système de veille et d’alerte permanente, tous les germes de division principalement entre les communautés ethniques, religieuses et régionales (discriminations raciales, ethniques ou religieuses et propagandes séparatistes ou suprématistes d’une communauté), afin de les réprimer et maintenir la cohésion nationale basée entre autres sur ce cousinage intra-ethnique et inter-ethnique.Dans les réseaux sociaux, radios, télévisions, lors des cérémonies et conférences religieuses, toutes les dérives verbales ou écrites seront interdites par les autorités gouvernementales, religieuses et coutumières et celles qui seront identifiées seront énergiquement condamnées et au besoin donner lieu à des poursuites judiciaires.

5.  Le Peuple « attaché à l’idéal de l’unité africaine », « affirme sa détermination à lutter pour la paix et la fraternité avec tous les peuples du monde ».

Dès lors, il appartient au PR et aux autres gouvernants d’éduquer et de conscientiser pour cultiver le sentiment « afropatriotique1 » des citoyens qui emporte le patriotisme économique, et œuvrer pour que tous les préalables à une union véritable des États africains soient réalisés. Parmi ces préalables, il y a principalement la fin du « sous-développement mental » des « élites » gouvernantes, le respect scrupuleux dans chaque État des règles et principes de l’État de droit, des droits de l’homme, de la démocratie, de la bonne gouvernance et de la transparence dans la gestion des affaires publiques (« Oiseaux de même plumage volent en compagnie ») et la priorisation de l’intégration politique qui donnera plus de sens et de solidité à toutes les autres intégrations dont celle économique.

S’agissant de la paix et de la fraternité avec tous les peuples du monde, la priorité doit être accordée aux peuples africains avec lesquels une véritable union doit être recherchée, alors qu’avec les autres peuples, la poursuite de cet objectif doit reposer sur des rapports gagnant-gagnant avec, dans tous les cas, la primauté des intérêts nationaux et africains sur tous les autres intérêts, en vertu d’un  adage bien de chez nous, dont l’adaptation dans les relations internationales donnerait : « sama reew moma gȅnal du bañ na sa reew » qui signifierait « j’aime plus mon pays ne veut pas dire que je déteste le vôtre » rejoignant ainsi le Marechal de Belle-Isle qui précisait que l’amour de sa patrie ne peut pas « inspirer la haine du monde ».

6.  Le peuple affirme « son adhésion à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 et aux instruments internationaux »

Il s’agit des instruments internationaux qui ont été mentionnés plus haut. Conséquemment, le PR doit utiliser à bon escient le pouvoir de législation, de réglementation, de régulation, de contrôle et de contrainte qui est délégué à l’État par le peuple souverain, pour une bonne transposition des libertés fondamentales et des droits reconnus par les deux Chartes et pour garantir leur respect. Il doit en outre faire dispenser une formation adéquate aux citoyens (basée sur des lois et des règlements explicites) afin qu’ils soient bien informés de ces « libertés fondamentales et droits de l’homme », et prennent conscience du fait que la jouissance de ceux-ci commande aussi un respect scrupuleux de leurs devoirs. Voir aussi point 3. ci-dessus.

7. Le peuple affirme « son attachement à la transparence dans la conduite et la gestion des affaires publiques ainsi qu’au principe de bonne gouvernance ».

Dès lors le PR a l’obligation de prendre toutes les mesures idoines pour que la transparence ; la gestion sobre et vertueuse des ressources appartenant au Peuple souverain ; une adéquate priorisation des dépenses publiques, et une lutte efficace contre toutes les malversations qui constituent des freins à l’optimisation de la satisfaction des besoins socioéconomiques et sécuritaires des populations, soient des réalités. Mais pour cela, il faut que le PR soit exemplaire dans ce domaine et s’interdise toute protection de ses parents et alliés afin de respecter l’égalité devant la loi de tous les citoyens.

Il doit veiller à une application optimale des dispositions des articles 25-1 à 25-3 de la Constitution relatifs aux devoirs du citoyen et de l’État en ce qui concerne  notamment la lutte contre la corruption et la concussion; le respect du bien public, la gestion transparente des ressources naturelles et foncières appartenant au peuple et la protection de l’environnement, ainsi que la contribution à l’œuvre de développement économique et social de la Nation singulièrement en s’acquittant de ses obligations fiscales en fonction de ses possibilités réelles. Dans ce cadre, l’élaboration d’une loi qui permettrait une bonne application de ces devoirs et qui inclurait la protection des lanceurs d’alerte et des témoins, afin que les citoyens puissent remplir sans crainte les devoirs énoncés par l’alinéa 2 de l’article 25-3 de la Constitution et par le point 7.3 du Code de Transparence dans la Gestion des Finances publiques (Loi n° 2012-22 du 27 décembre 2012), doit être priorisée.

8. Le peuple proclame « le principe intangible de l’intégrité du territoire national et de l’unité nationale dans le respect des spécificités culturelles de toutes les composantes de la Nation ».

Dès lors, le PR doit développer sa capacité de résolution des conflits, en prenant toutes les mesures devant permettre, que l’expression des spécificités culturelles et de la diversité de toutes les composantes de la Nation soient utilisées et valorisées comme des atouts servant à renforcer la cohésion nationale et les enrichissements mutuels, et servent à renforcer le respect du « principe intangible de l’intégrité du territoire national et de l’unité nationale ». Voir aussi point 4. ci-dessus.

9. Le peuple proclame « l’inaltérabilité de la souveraineté nationale qui s’exprime à travers des procédures et consultations transparentes et démocratiques ».

Dès lors, le PR doit veiller à ce que le tripatouillage de la Constitution et du Code électoral pour la sauvegarde d’intérêts politiciens, le rejet de la recherche de consensus et le manque de transparence soient bannis du jeu politique.

10. Le peuple proclame «la séparation et l’équilibre des pouvoirs conçus et exercés à travers des procédures démocratiques ».

Dès lors, le PR doit engager patriotiquement toutes les réformes institutionnelles devant permettre de corriger le déficit d’indépendance des pouvoirs législatif et judicaire avec notamment le changement du mode d’élection des députés par la suppression de la liste nationale et la réforme du Conseil supérieur de la Magistrature.

11. Le peuple proclame « le respect et la consolidation d’un État de droit dans lequel l’État et les citoyens sont soumis aux mêmes normes juridiques sous le contrôle d’une justice indépendante et impartiale ».

Une justice indépendante et impartiale ne s’accommode pas avec les pouvoirs exorbitants d’un Procureur de la République, subordonné au pouvoir exécutif et coauteur ou complice de l’instauration d’une impunité sélective. Le PR doit veiller, à ce que les « juges soient exclusivement soumis à l’autorité de la loi dans l’exercice de leurs fonctions » afin d’atténuer la forte perception d’une Justice à deux vitesses, et à l’institution d’un Juge des libertés pour mettre fin aux mises sous mandat de dépôt abusives et aux rejets injustifiés de demandes de liberté provisoire.

12. Le peuple proclame « l’accès de tous les citoyens, sans discrimination, à l’exercice du pouvoir à tous les niveaux ».

Cette absence de discrimination doit concerner principalement les femmes. Le PR doit tout mettre en œuvre pour encourager / faciliter l’accès des femmes aux postes de responsabilité. Une discrimination positive est indispensable dans ce sens. Cependant cette discrimination positive doit être subordonnée à l’existence des compétences féminines, et cela emporte le besoin de renforcement de leurs capacités notamment dans l’exercice du commandement et du leadership politique pour faciliter leur accès aux hauts postes de responsabilités, voire même au niveau suprême.

13. Le peuple proclame « l’égal accès de tous les citoyens aux services publics ».

Dès lors, le PR doit veiller à ce que toutes les mesures soient prises pour minimiser les disparités entre les terroirs, en ce qui concerne l’édification des structures de santé, d’éducation et de sécurité ainsi que dans la fourniture d’eau et d’électricité, dans l’assainissement et dans la construction de voies de communication pour les désenclavements, en accordant une protection particulière aux personnes vulnérables notamment aux personnes handicapées, aux personnes âgées et aux enfants.

14. Le peuple proclame « le rejet et l’élimination, sous toutes leurs formes de l’injustice, des inégalités et des discriminations ».

Dès lors, le PR doit veiller à ce que toutes les pratiques d’accaparement, de corruption et de gabegie qui, approfondissent le fossé entre les plus riches et les plus pauvres ; constituent un obstacle à l’optimisation des ressources disponibles pour répondre aux besoins sécuritaires et socioéconomiques des populations, et retardent la résolution des problèmes que connaissent les secteurs stratégiques de la santé et de l’éducation, soient efficacement combattues. Une Justice indépendante et impartiale et des Corps de contrôle indépendants doivent être des partenaires intransigeants et efficaces dans la lutte contre les crimes économiques qui amplifient les injustices et les inégalités.

15. Le peuple proclame « la volonté du Sénégal d’être un État moderne qui fonctionne selon le jeu loyal et équitable entre une majorité qui gouverne et une opposition démocratique, et un État qui reconnaît cette opposition comme un pilier fondamental de la démocratie et un rouage indispensable au bon fonctionnement du mécanisme démocratique ».

Dès lors, le PR doit s’interdire toute manœuvre visant à « réduire l’opposition à sa plus simple expression » et faire élaborer patriotiquement la loi devant « définir le statut de l’opposition et fixer les droits et devoirs y afférents ainsi que ceux du Chef de l’opposition » (Article 58) et d’autre part de celle qui devrait déterminer « les règles de constitution, de suspension et de dissolution des partis politiques, les conditions dans lesquelles ceux-ci exercent leurs activités et bénéficient d’un financement public » (article 4) et qui abrogerait la loi n° 81-17 du 6 mai 1981 relative aux partis politiques modifiée par la loi n°89-36 du 12 octobre 1989.

IV.    LES DEVOIRS DE L’ÉTAT OU DU CHEF DE CET ÉTAT QUI EMANENT DU TITRE PREMIER DE LA CONSTITUTION : DE L’ÉTAT ET DE LA SOUVERAINETÉ

1. « La République du Sénégal est laïque, démocratique et sociale. (…). Elle respecte toutes les croyances ».

Pour un peuple qui a consacré sa religiosité au travers de la prestation de serment du PR qui « jure devant Dieu et la Nation sénégalaise », la laïcité ne doit pas être un frein à l’institution par le PR de la « meilleure éducation sociale, morale et civique possible » des jeunes sénégalais, qui commande la prise en compte des prescriptions coraniques et bibliques d’ordre éthique comme adjuvant, dans la mesure où ce sont elles qui fondent la spiritualité des croyants, qui à son tour conditionne leur manière d’être et de faire.

Le PR doit aussi veiller, au libre exercice par les partis politiques et les citoyens de leurs droits ; à ce que le choix du peuple de ses représentants (Chef de l’État, députés et élus locaux) ne soit pas corrompu ; à l’acceptation inconditionnelle par les serviteurs de l’État du contrôle citoyen des politiques et actions publiques, et à ce que le peuple soit mis au centre des préoccupations des gouvernants, afin de satisfaire ses besoins et d’optimiser la libération des énergies créatrices.

2. « La République du Sénégal … assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race, de sexe, de religion. Elle respecte toutes les croyances ».

Le PR doit rejeter toute immixtion, d’où qu’elle vienne dans les affaires de la Justice afin de lui permettre, de s’ériger en gardien inconditionnel et incorruptible de « l’égalité devant la loi de tous les citoyens et d’être un protecteur efficace des libertés fondamentales et des droits de l’homme.

3. « Les langues nationales sont le Diola, le Malinké, le Pular, le Sérère, le Soninké, le Wolof et toute autre langue nationale qui sera codifiée ».

Le PR doit prendre résolument et méthodiquement des mesures allant dans le sens de la « dé-néocolonisation linguistique » qui permettrait, de faire du Wolof la langue d’unification nationale qui deviendrait une langue officielle à côté du français, et d’optimiser l’utilité fonctionnelle des autres langues nationales qui seraient utilisées, au moins dans le cycle primaire de l’éducation nationale et dans l’alphabétisation, afin de pouvoir atteindre les objectifs fixés notamment par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels sur l’éducation, minimiser les exclusions due à la barrière linguistique charriée par le français, renforcer la cohésion nationale et booster les échanges et les énergies créatrices.

4. « Le principe de la République du Sénégal est : gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple ».

Quand on parle de gouvernement par le peuple cela veut dire que les gouvernants sont soumis au jugement du peuple. Dès lors, des dispositions constitutionnelles doivent être prises pour que le peuple puisse sauvegarder sa souveraineté en sanctionnant tout PR ou gouvernant qui oublient, par ses actes, qu’il est un serviteur du peuple.

5. « Tous les nationaux sénégalais des deux sexes, âgés de 18 ans accomplis, jouissant de leurs droits civils et politiques, sont électeurs dans les conditions déterminées par la loi ».

Dans le cadre des exigences de la transparence dans l’exercice du droit de vote, le PR doit prendre des mesures pour que la délivrance d’une carte d’identité CEDEAO s’accompagne de l’inscription dans le fichier électoral dont la gestion doit être exclusivement assurée par des sénégalais. Cette carte d’identité devrait être corrigée par l’insertion du genre (M ou F) et de la filiation. Cette opération devrait être mise à profit pour résoudre définitivement le cas des personnes non sénégalaises à qui des extraits de naissances et des cartes d’identité auraient été vendus.

6. « La Constitution garantit des droits égaux aux partis politiques, y compris ceux qui s’opposent à la politique du Gouvernement en place. Les règles de constitution, de suspension et de dissolution des partis politiques, les conditions dans lesquelles ceux-ci exercent leurs activités et bénéficient d’un financement public sont déterminées par la loi ».

Voir point 15. du III. ci-dessus

7. « Tout acte de discrimination raciale, ethnique ou religieuse, de même que toute propagande régionaliste pouvant porter atteinte à la sécurité intérieure de l’État ou à l’intégrité du territoire de la République sont punis par la loi ».

Voir points 4. et 8. du III. ci-dessus

Au-delà des devoirs de l’État et donc du Président de la République qui émanent du Préambule et du Titre premier de la Constitution, il y a les articles 7 à 25-3 du Titre II qui mettent en exergue les « droits et libertés fondamentaux et les devoirs des citoyens » qui induisent des devoirs de l’État qui doit prendre toutes mesures idoines pour les rendre effectifs et les protéger. Ces devoirs sont naturellement des devoirs du Président de la République en tant que Chef de cet État, personne morale. Ces devoirs ne sont pas développés dans cet article car beaucoup parmi eux figurent parmi ceux générés par le Préambule et le Titre Premier de la Constitution.

Par contre, nousnous sommes intéressé aux libellés des serments desPrésidents de la République du Niger, du Bénin, de la Côte d’ivoire, du Gabon et de la République Démocratique du Congo, et y avons identifié d’importantes expressions qui ne sont pas contenues dans celui du Président de la République du Sénégal et qui permettent de mieux préciser ou de compléter les devoirs de ce dernier.

V. APPORT DE l’ANALYSE DES SERMENTS DES PRÉSIDENTS DE LA RÉPUBLIQUE DE CINQ (5) PAYS AFRICAINS.

Les principales expressions qui figurent dans au moins un des cinq (5) serments qui ont été exploités et qui ne figurent pas dans le serment du PR du Sénégal sont les suivantes suivies de commentaires :

1. « le peuple…, seul détenteur de la souveraineté ».

Cette souveraineté du Peuple constitutionnellement consacré au Sénégal mérite bien de figurer dans les termes du serment d’un Président de la République dont toutes les actions doivent tendre vers la satisfaction des aspirations du Peuple.

2. « de remplir loyalement consciencieusement et en fidèle serviteur du peuple les devoirs de ma charge dans l’intérêt supérieur de la Nation »

Remplir loyalement ses devoirs commande de s’interdire toute manipulation, toute tromperie, tout tripatouillage des lois et règlements pour des intérêts personnels. Le fait que le Président reconnaisse dans son serment qu’il est un « serviteur du peuple » est tout à fait pertinent surtout dans un pays comme le Sénégal où le Président a tendance à se comporter comme un « Borom rewmi » (ou « le Propriétaire du pays »). Un « fidèle serviteur » se conforme et prend des mesures pour le respect strict des grandes orientations données par le peuple au travers du Préambule de la Constitution.

3. « être juste, équitable et respectueux des droits, libertés et dignité de la personne humaine »

Justice et équité dans tous les domaines mais particulièrement dans la répression de tout ce qui cause un préjudice aux personnes physiques dans l’expressions de leurs droits et libertés, notamment de la liberté de manifestation qui ne doit pas être enfreinte par des interdictions abusives. Dans l’exercice de la police judiciaire et de la police administrative, dont le maintien et le rétablissement de l’ordre, les actes de torture, et les actes cruels, inhumains et dégradants doivent être bannis comme une exigence de la protection de la vie et de la dignité des citoyens.

4. « de consacrer toutes mes forces à la recherche et à la promotion du bien commun, de la paix, de la sécurité et du bonheur du peuple préservé de tout dommage »

Le bonheur du peuple est l’objectif final recherché de toutes les politiques publiques et son optimisation ne s’accommode pas avec le fait de lui faire subir sciemment des dommages. Un « peuple préservé de tout dommage », c’est un peuple servi par des gouvernants dont les efforts tendent à optimiser les réponses aux besoins sécuritaires et socio-économiques notamment par une gestion vertueuse des biens publics protégés contre toutes les malversations. Il appartient au PR de prendre les mesures qui s’imposent à cet effet et non se complaire dans la protection des criminels à col blanc qui sont les principaux inducteurs des dommages causés au Peuple.

5. « veiller à la neutralité de l’administration et à l’observation des principes d’équité et de continuité ».

Cet engagement emporte l’obligation pour le PR de tout faire pour que les principes et les règles garantissant un bon fonctionnement de l’État soient appliqués fidèlement dans toutes les sphères étatiques et que la politisation de l’administration soit bannie, avec l’identification des postes stratégiques qui ne doivent pas être tenus par des politiciens. Afin de faciliter la continuité, cet engagement impose aussi au PR en fin de mandat, de s’interdire au moins six (6) mois avant les élections d’initier, sans concertation avec tous les partis politiques et sans la recherche de consensus, de grands projets ou contrats dont l’urgence n’est pas évidente, et qui vont lier son éventuel remplaçant.

6. « Que le peuple me retire sa confiance et que je subisse la rigueur des lois si je trahi mon serment »

Le PR qui, sciemment trahit son serment, en ne respectant pas l’ensemble de ses devoirs et obligations et en mettant les intérêts privés nationaux ou étrangers au-dessus de ceux du pays, ou qui, au lieu de lutter efficacement contre la corruption et la gabegie, protège manifestement tous les criminels à col blanc de son camp devrait pouvoir être démis de ses fonctions, comme une exigence d’ailleurs du « principe de la République du Sénégal » au point 4. du IV. ci-dessus. Tous les pays africains devraient se doter de lois et de procédures pouvant facilement être mises en œuvre à cet effet. Il suffirait, pour le développement de ces lois et procédures, de se référer à des pays comme le Brésil où des Présidents ont été démis de leur fonction notamment pour des faits de corruption.

Ce point 6. pose un important aspect relatif à la destitution des Chefs d’État africains qui se transforment en pilleurs des ressources de leurs peuples et qui, par leur sous-développement mental qui est un élément du déficit de patriotisme, maintiennent leurs peuples dans la misère, alors que leurs pays sont les plus riches en ressources naturelles dans le monde. Si les procédures d’accusation et de destitution étaient prévues par les Constitutions, elles constitueraient des moyens de dissuasion de ces Chefs d’État qui perpétuent la mal gouvernance qui porte de lourds préjudices aux États et aux citoyens, victimes collatérales des égoïstes pilleurs des Républiques.

NOTES:

1: «Afropatriotisme» peut être défini comme: «Un amour pour l’Afrique, un attachement sentimental au Continent, se manifestant par la ferme volonté de promouvoir son union, de sauvegarder son intégration; par la fierté de lui appartenir; par le souhait ardent de pouvoir optimiser sa contribution à son développement pour le bonheur de tous ses fils et par une disponibilité à lui sacrifier ses biens, ses intérêts les plus chers, son sang et sa vie.» Cet « afropatriotisme » a la primauté sur le patriotisme pour toutes les affaires qui relèveraient des États Unis d’Afrique ou des cinq (5) États Unis Régionaux (Afrique de l’ouest, Afrique centrale, Afrique du nord, Afrique de l’Est et Afrique australe) si cette option d’une évolution par les « cercles concentriques » est choisie.

Tabasky DIOUF, Colonel de Gendarmerie à la retraite

Grand officier dans l’ordre national du lion et Commandeur dans l’ordre du mérite

Membre fondateur de l’initiative Citoyenne Jog Ngir Senegaal

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