L’hypocrisie est une « attitude consistant à dissimuler / camoufler son caractère, ses pensées, ses véritables intentions, à affecter des sentiments, des opinions, des vertus qu’on n’a pas, pour inspirer confiance et se présenter sous un jour favorable dans la poursuite de desseins strictement personnels ou pour porter préjudice à autrui. Les hypocrites ne sont ni des vrais croyants, ni des mécréants. Les hypocrites qui cachent la haine qu’ils éprouvent dans leur coeur ou leur jalousie derrière des paroles doucereuses ou flatteuses ou qui disent du mal de leurs prochains pour s’attirer les faveurs du détenteur de pouvoir ou porter préjudice à l’autre par carriérisme ou pure méchanceté ont « des lèvres de mensonge ». Les Hommes ayant cette maladie (l’hypocrisie) au coeur peuvent tromper les hommes, mais Dieu Omniscient et Clairvoyant sur tout ce que font les Hommes, embrasse de Sa science tout ce qu’il y a dans leur coeur et ce qu’ils cachent, sans compter le fait qu’il y a les anges qui enregistrent toutes leurs transgressions et les parties de leurs corps qui ont des droits, et qui témoigneront contre eux quand l’Heure arrivera ».
L’hypocrisie est donc un vice très grave, que trop de musulmans ont tendance à banaliser, malgré les avertissements contre les hypocrites contenus dans le Coran. Ce vice peut d’ailleurs être considéré comme le générateur de toutes les mauvaises oeuvres qui sont les expressions de la crise morale au sein de la communauté musulmane, de la gestion non vertueuse des ressources appartenant aux personnes morales (Etat, Communautés d’appartenance et Organismes employeurs) et de la corruption des rapports sociaux par des vices tels que la déification des richesses matérielles, le mensonge et ses vices connexes (la calomnie, la médisance, la flagornerie, le non-respect des engagements ou de la parole donnée), l’injustice, l’iniquité, l’égoïsme, la méchanceté, la jalousie et l’envie, Allah a dit dans le Coran :
- « Laisse ceux qui prennent leur religion pour jeu et amusement et qui sont séduits par la vie sur terre. Et rappelle par ceci (le Coran) pour qu’une âme ne s’expose pas à sa perte selon ce qu’elle aura acquis, elle n’aura en dehors d’Allah ni allié ni intercesseur. Et quelle que soit la compensation qu’elle offrirait, elle ne sera pas acceptée. Ceux-là se sont abandonnés à leur perdition à cause de ce qu’ils ont acquis. Leur breuvage sera l’eau bouillante et ils auront un châtiment douloureux pour avoir mécru. » (S 6 V 70)
- « Annonce aux hypocrites qu’il y a pour eux un châtiment douloureux. Les hypocrites cherchent à tromper Allah, mais Allah retourne leur tromperie contre eux-mêmes. Et lorsqu’ils se lèvent pour la Salat, ils se lèvent avec paresse et par ostentation envers les gens. A peine invoquent ils Allah. Les hypocrites seront, certes, au plus bas fond du Feu, et tu ne leur trouveras jamais de secoureur, sauf ceux qui se repentent, s’amendent, s’attachent fermement à Allah, et Lui vouent une foi exclusive. Ceux-là seront avec les croyants. Et Allah donnera aux croyants une énorme récompense. » (S 4 V 138,142,145, 146)
L’observation du comportement des sénégalais, nous a permis de nous rendre compte du nombre trop élevé de musulmans qui sont des hypocrites, très probablement sans en être vraiment conscients. Trop de musulmans sénégalais ne savent peut-être pas que la vraie croyance et confiance en Dieu qui pousse le croyant à « se battre sans cesse contre lui-même » pour ne pas commettre sciemment une chose interdite par le Créateur est antinomique avec toute hypocrisie.
C’est pourquoi, pour contribuer modestement à l’éveil des consciences, nous allons partager notre analyse de la première sourate du Coran, « Al-Fatiha ». Quand Dieu nous a poussé à méditer sur le contenu de cette sourate et à l’analyser, nous avons compris pourquoi des érudits affirment que la « sourate Al Fatiha », la « sourate de l’Ouverture », le « Prologue », les « sept versets que l’on répète » (S 15 V 87), la « sourate de Bienvenue du Livre », l’« Ouvrante du Livre» est la plus importante sourate du Coran. Elle est la « Mère du Livre », la « Base du Coran », la « Liminaire du Livre », la « Suffisante », parce qu’elle se passe des autres, alors que les autres ne peuvent pas se passer d’elle. D’ailleurs Dieu a dit dans ce sens, au verset 87 de la sourate 15 : « Nous t’avons certes donné « les sept versets que l’on répète », ainsi que le Coran sublime », mettant ainsi en exergue la particularité de la « sourate Al Fatiha » par rapport au reste du Coran.
A travers la « sourate Al Fatiha », Dieu indique la formule qu’il faut prononcer avant de faire quoi que ce soit afin que toutes les bonnes oeuvres que vous accomplissez pour Sa face soient des actes d’adoration (Verset 1 : Au nom d’Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux). Dieu nous apprend aussi dans cette sourate comment lui rendre grâce (Versets 2 et 3 : Louange à Allah, Seigneur de l’univers. Le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux) ; comment affirmer Sa grandeur (Verset 4 : Maître du Jour de la rétribution) ; comment renouveler sans cesse notre profession de foi, notre serment d’allégeance et notre conviction qu’Il est le Seul Pourvoyeur, Dispensateur, Protecteur et Guérisseur qui mérite qu’on l’adore et lui demande un secours ( Verset 5 : C’est Toi Seul que nous adorons, et c’est Toi Seul dont nous implorons secours), et comment implorer sa guidance (Versets 6 et 7 : Guide-nous dans le droit chemin, le chemin de ceux que Tu as comblés de faveurs, non pas de ceux qui ont encouru Ta colère, ni des égarés). Par ces deux derniers versets, Dieu nous révèle aussi, qu’il y a des gens qui ont encouru Sa colère et des égarés qu’Il ne guide pas. En parcourant le Coran nous découvrons qu’« Allah » a formellement indiqué qu’Il ne guide pas «les gens injustes», «les gens mécréants», «les gens pervers», les « traitres», «ceux qui s’égarent», «celui qui est menteur et ingrat» et «celui qui est outrancier et imposteur».
Parce que pour un musulman, marcher dans le « droit chemin » est un impératif, Dieu a imposé la récitation de la sourate de l’Ouverture (Al Fatiha) dans chaque séquence (« raaka ») de ses prières canoniques et surérogatoires afin notamment que le croyant ait toujours présent à l’esprit les exigences du cheminement dans le « droit chemin » et se forge la ferme volonté de se plier à ces exigences.
Voyons maintenant ce que nous voulons, par amour pour les autres, que chaque musulman intériorise afin de pouvoir se forger une mentalité de vrai croyant et se prémunir contre l’hypocrise et contre tous les autres vices qui poussent les Hommes à commettre sciemment, ou en état d’égarement, de mauvaises oeuvres.
Le musulman est donc obligé de réciter dans chaque séquence (« raaka ») de ses cinq (5) prières obligatoires (au total 17 récitations journalières) ou surérogatoires la sourate Al-Fatiha. Dans chaque unité de prière il dit, s’adressant à Dieu : « C’est Toi Seul que nous adorons, et c’est Toi Seul dont nous implorons secours. Guide-nous dans le droit chemin, le chemin de ceux que Tu as comblés de faveurs, non pas de ceux qui ont encouru Ta colère, ni des égarés » (S 1 V 5-7).
Le musulman qui s’adresse si intensément à Dieu sait aussi, qu’Il a dit n’avoir « créé les djinns et les hommes que pour qu’ils L’adorent » (S 51 V 56) en s’évertuant à respecter scrupuleusement Ses commandements, et qu’« Il a certes créé l’homme pour une vie de lutte » (S 90 V 4) principalement celle contre soi-même ou contre son âme charnelle pour éviter d’enfreindre sciemment Ses Ordres et Interdits.
Le musulman sait en outre, que Dieu veut que l’Homme suive « la voie difficile » (S 90 V 10-18) qui est celle de « ceux qui croient et s’enjoignent mutuellement l’endurance, et s’enjoignent mutuellement la miséricorde », et que « ceux qui croient » sont indiscutablement ceux qui luttent pour mécroire au Diable (« ennemi déclaré de l’Homme ») et s’évertuer à respecter toutes les prescriptions divines de manière non sélective,
Le musulman sait en plus, que « l’endurance » est requise pour pouvoir supporter toutes les épreuves et demeurer ancré irréversiblement sur la « voie difficile ». Enfin, le musulman sénégalais sait qu’il y a un adage wolof « ndimbal na ca fekk loxol boroom » pour dire que seul celui qui s’active pour accomplir ce qui relève de sa propre responsabilité, doit bénéficier d’une aide. Ceci doit pousser ce musulman à être conscient du fait que pour bénéficier de la guidance de Dieu Omniscient, il faut qu’il le veuille sincèrement dans son coeur et lutte sincèrement dans ce sens contre son âme charnelle.
Compte tenu de tout ce qui précède, il apparait évident que pour un musulman, hypocrisie ne peut être plus grande que de « demander si intensément à Dieu de vous guider sur le droit chemin » et se permettre de commettre sciemment des infractions à la loi divine notamment : en nourrissant délibérément ces vices qui ont corrompu les rapports sociaux ; en sollicitant volontairement les services maléfiques de « marabouteurs »1, de sorciers ou de « pseudo-guérisseurs » ; en se faisant le complice ou le protecteur de criminels à col blanc ; en acceptant une part des ressources publiques détournées injustement ; en s’alliant avec les pilleurs antipatriotes ; en ayant le coeur vidé de Dieu et rempli de son marabout ou en s’impliquant intentionnellement dans des intrigues, des trahisons, des magouilles ou des combines qui sont des sources de préjudices matériels ou immatériels dont pâtissent des personnes morales trahies ou des citoyens jalousés.
Il suffit donc de voir comment se comportent de nombreux musulmans sénégalais pour constater le degré de corruption des rapports sociaux et conclure, en toute vérité, que l’hypocrisie est l’une des choses les mieux partagées au sein de la Communauté musulmane, qui concentre l’écrasante majorité de la population. Mais « l’ignorance étant la mère de tous les vices », nous pensons que c’est parce que beaucoup parmi les musulmans sénégalais sont « égarés » par les passions (argent, plaisirs, pouvoirs) ou n’ont pas eu la chance de comprendre ce que Dieu attend d’eux au travers de l’imposition de la récitation fréquente de la sourate « Al-Fatiha ».
Il appartient donc aux « sachants » (les Imams, les vrais guides religieux et les prêcheurs véridiques) d’ouvrir les esprits des fidèles à la bonne compréhension de ce que Dieu attend d’eux, de les sortir de leur « égarement » et de participer à la transformation ou au reformatage de leurs coeurs et de leurs esprits pour un retour véritable vers le Créateur de toute chose.
Cet « égarement » par les passions est une donnée importante du Coran que tous les musulmans doivent avoir à l’esprit, comme le veut Dieu qui, au travers des deux versets fondamentaux transcrits ci-après, nous a révélé que tous les Hommes courent le risque d’être égarés par la passion qui fait dévier de la justice, alors qu’Il s’est interdit l’injustice et l’a donc interdit à tous les Hommes. En effet, Dieu a dit :
« “Ô David, Nous avons fait de toi un calife sur la terre. Juge donc en toute équité parmi les gens et ne suis pas la passion : sinon elle t’égarera du sentir d’Allah”. Car ceux qui s’égarent du sentier d’Allah auront un dur châtiment pour avoir oublié le Jour des Comptes. » (S «38 V 26)
« Ô les croyants ! Observez strictement la justice et soyez des témoins véridiques comme Allah l’ordonne, fût-ce contre vous-mêmes, contre vos père et mère ou proches parents. Qu’il s’agisse d’un riche ou d’un besogneux, Allah a priorité sur eux deux et Il est plus connaisseur de leur intérêt que vous. Ne suivez donc pas les passions afin de ne pas dévier de la justice. Si vous portez un faux témoignage ou si vous le refusez, sachez qu’Allah est Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites. » (S 4 V 135)
Si nous voulons arrêter de porter préjudice à nos propres âmes et aux personnes physiques et morales, chacun de nous doit faire honnêtement son autocritique pour mesurer son degré d’hypocrisie et se forger la volonté de rompre avec ce vice largement évoqué dans le Coran duquel nous avons, pour conclure, extrait les versets qui suivent :
« Les hypocrites, (…). Ils commandent le blâmable, interdisent le convenable et replient leurs mains (d’avarice). Ils ont oublié Allah et Il les a alors oubliés. En vérité, les hypocrites sont les pervers. » (S 9 V 67).
« Parmi les gens, il y a ceux qui disent : “Nous croyons en Allah et au Jour dernier ! ” tandis qu’en fait, ils n’y croient pas. Ils cherchent à tromper Allah et les croyants ; mais ils ne trompent qu’eux-mêmes, et ils ne s’en rendent pas compte. Il y a dans leurs coeurs une maladie (de doute et d’hypocrisie), et Allah laisse croître leur maladie. Ils auront un châtiment douloureux, pour avoir menti. (S 2 V 8 à 10)
« Annonce aux hypocrites qu’il y a pour eux un châtiment douloureux. Les hypocrites cherchent à tromper Allah, mais Allah retourne leur tromperie (contre eux-mêmes). Et lorsqu’ils se lèvent pour la Salat, ils se lèvent avec paresse et par ostentation envers les gens. A peine invoquent ils Allah. Les hypocrites seront, certes, au plus bas fond du Feu, et tu ne leur trouveras jamais de secoureur, sauf ceux qui se repentent, s’amendent, s’attachent fermement à Allah, et Lui vouent une foi exclusive. Ceux-là seront avec les croyants. Et Allah donnera aux croyants une énorme récompense. » (S 4 V 138,142,145, 146)
« Ô Prophète, lutte contre les mécréants et les hypocrites, et sois rude avec eux ; l’Enfer sera leur refuge, et quelle mauvaise destination ! Ô Prophète ! Mène la lutte contre les mécréants et hypocrites et sois rude à leur égard. Leur refuge sera l’Enfer, et quelle mauvaise destination !» (S 9 V 73 ; S 66 V 9))
NOTE : 2 : Le néologisme « Marabouteur » est retenu pour indiquer le « marabout » qui « maraboute » ou qui fait du maraboutage communément compris comme le fait d’accomplir une action maléfique ou un acte qui ne va pas dans le sens du « bien véritable ». « Pseudo-guérisseur » est aussi employé pour désigner le guérisseur qui accepte de faire un travail qui ne va pas dans le sens de la recherche du « bien variable ».
Colonel de Gendarmerie (er) Tabasky Diouf
Grand officier de l’Ordre national du Lion et Commandeur dans l’Ordre du mérite
Membre fondateur de l’Initiative Citoyenne « Jog Ngir Senegaal »
Cet article pointe du doigt la crise morale que notre pays traverse avec la perte des valeurs fondamentales. La facilité avec laquelle nous contrevenons aux recommandations divines est le fruit d’un cheminement caractérisé par l’irresponsabilité.
Nous pratiquons notre religion comme nous l’entendons mais pas comme elle nous est recommandée.
Dire la vérité est devenue une tare et les imposteurs, connus de tous, sont élevés au rang de héros, parce que distributeurs de billets de banques ambulant.
Une profonde introspection partagée par toute la communauté est un point de passage obligatoire pour changer de direction.
La bonne direction permettant à un peuple de se prendre en charge en comptant d’abord sur lui-même et s’affranchir ainsi de toute assistance malsaine et inhibitrice.
Cet article pointe du doigt la crise morale que notre pays traverse avec la perte des valeurs fondamentales. La facilité avec laquelle nous contrevenons aux recommandations divines est le fruit d’un cheminement caractérisé par l’irresponsabilité.
Nous pratiquons notre religion comme nous l’entendons mais pas comme elle nous est recommandée.
Dire la vérité est devenue une tare et les imposteurs, connus de tous, sont élevés au rang de héros, parce que distributeurs de billets de banques ambulant.
Une profonde introspection partagée par toute la communauté est un point de passage obligatoire pour changer de direction.
La bonne direction permettant à un peuple de se prendre en charge en comptant d’abord sur lui-même et s’affranchir ainsi de toute assistance malsaine et inhibitrice.