Abusive espérance de la miséricorde divine

27 décembre 2023 | 0 commentaires

La crise morale que traverse le pays est caractérisée, dans le volet corruption des rapports sociaux, par une forte présence des vices comme le mensonge, l’hypocrisie, l’injustice, l’égoïsme, l’intempérance dans la recherche de biens et des plaisirs, la cupidité, la méchanceté, la jalousie, les envies qui poussent à la commission d’actes qui portent préjudice aux personnes physiques et morales, en total déphasage avec les exigences de l’amour qui est le fondement de toutes les religions révélées et du patriotisme, qui est antinomique avec les scandaleuses malversations qui ont tendance à être banalisées et qui sont une des expressions du deuxième volet de la crise morale, représenté par la mal gouvernance.

L’importance des mauvaises pratiques au sein de la société sénégalaise, particulièrement au sein de la Communauté musulmane et dans les organes étatiques est en totale déphasage avec la pureté du dogme islamique avec l’existence formelle de prescriptions coraniques d’ordre éthique qui s’opposent à tous ces vices et défauts qui induisent ces expressions de la crise morale.

Cette banalisation de la commission de mauvaises œuvres dans un pays où le peuple a consacré sa religiosité au travers de la prestation du Président de la République (Article 37) qui jure « Devant Dieu et devant la Nation sénégalaise » est principalement imputable à l’ignorance, à l’égarement, aux promesses trompeuses du Paradis par certains guides religieux et à cette propagation des invocations et prières « effaceuses » de péchés, sans une claire indication des conditions préalables à leur éventuelle acceptation par « Le Pardonneur », qui pousse trop de musulmans, qui ont abandonné Dieu au profit des idoles de notre temps (argent, plaisirs, places, privilèges et pouvoir), à vivre dans les récidives permanentes, croyant détenir des secrets leur permettant de faire effacer leurs péchés sans aucun lien avec le repentir. C’est cet état d’esprit qui traduit une « abusive espérance de la miséricorde divine ».

Cet article qui se veut être un appel contre cette « abusive espérance de la miséricorde divine » sera articulé autour des points suivants : Situation et conséquences de la non précision des préalables à l’effacement des péchés (I.) ; des versets coraniques relatifs au repentir et au pardon des péchés (II.) ; La « science des préalables » (III.) et les attitudes souhaitables (IV.).

I.       SITUATION ET CONSÉQUENCES DE LA NON PRÉCISION DES PRÉALABLES A L’EFFACEMENT DES PÉCHÉS.

Malgré les avertissements faits aux associateurs, aux égarés, aux hypocrites, aux ingrats, aux intempérants, aux injustes et aux méchants dans le Coran, nous assistons à une sorte de «je-m’en-foutisme», de certains musulmans, marqué par un grand relâchement dans le respect des exigences de l’adoration exclusive de Dieu et une insouciance par rapport à l’étendue et à la gravité des péchés qui sont quotidiennement commis dans notre pays par des gens qui ont fait détrôner Dieu dans leur cœur par leur marabout ou par les idoles de notre temps.

En fournissant des invocations ou des prières surérogatoires qui effacent des péchés sans mettre suffisamment l’accent sur les conditions qui doivent être réunies pour qu’elles soient susceptibles d’être acceptées par « L’Unique Pardonneur », les propagateurs (chefs religieux, prêcheurs, Imams, simples musulmans) contribuent à égarer les «faibles d’esprit», les vicieux, les véreux, les musulmans incapables d’aller au-delà de la lettre des invocations et prières qui leur sont fournies, les croyants qui ont l’esprit tourné vers le mal et ceux qui, aveuglés par les passions, sont partisans du moindre effort dans le respect des prescriptions divines.

En effet, pensant détenir au travers de ces invocations et prières surérogatoires des « ficelles, des clefs, des astuces, des recettes » qui leur permettront à des intervalles de temps qu’ils auront choisis, d’obtenir que « Le Détenteur du pouvoir de punir » ou « Le Pardonneur », efface leurs péchés passés et futurs pour un nombre d’années supérieures à celles qu’il leur reste logiquement à vivre ; leur fasse recouvrer la pureté qu’ils avaient à leur naissance ; mette le compteur de leurs péchés à zéro pour tout le reste de leur vie ou rende leur âme impure pour l’Enfer, les susmentionnés vont se complaire dans une médiocre adoration marquée par des récidives permanentes. Cette « abusive espérance de la miséricorde divine » contribue ainsi à la perpétuation de la crise morale qui est une destructrice de développements personnels, une annihilatrice du respect des principes de prudence et de précaution, une retardatrice dans la marche vers l’émergence, une séparatiste des individus et des communautés, une déstabilisatrice des pays, une « perpétuatrice » du sous-développement et de la balkanisation du Continent.

Par ailleurs, il ne fait l’ombre d’aucun doute que trop d’injustices entre les hommes ; trop de mensonges, d’hypocrisies et de tromperies ; trop de méchancetés, de jalousies et d’envies maladives entre les Hommes ; trop de sorcellerie, de maraboutages et autres actions maléfiques ; trop de mutisme, de complicité ou d’indifférence blâmables de Khalifes et d’honnêtes gens ayant rendu d’éminents services à l’Etat face à la mauvaise conduite des leaders (gouvernants, hauts commis de l’Etat et faux chefs religieux) et au système de mal gouvernance ; trop d’accaparements et d’injustes captations des ressources de l’Etat dont sont coupables des leaders temporels et religieux «sous-développés mentaux» se souciant trop peu des énormes préjudices qu’ils causent à l’Etat qui se retrouve incapable de satisfaire tous les besoins primaires des populations (fourniture d’eau et d’électricité, éducation, santé, sécurité alimentaire,…) plus de 60 ans après l’indépendance, peuvent attirer le désastre sur notre peuple, conformément aux avertissements contenus dans le Coran et que Abou Bakr (Da) premier «Khalifa» après la mort du Prophète (PSL) a eu à rappeler dans son premier sermon. D’ailleurs, notre intime conviction est que le naufrage du bateau le « Joola » est une punition collective qu’Allah a infligée au peuple sénégalais pour la mauvaise conduite d’un nombre trop important de ses membres, notamment des leaders et d’une absence de repentir sincère de tous ceux qui commettent de grands péchés dans leurs rapports avec l’Etat et avec leurs concitoyens.

Voyons ce que nous dit le Coran au sujet du repentir et de l’effacement des péchés par « l’Unique Pardonneur » qui n’a délégué ce pouvoir à aucun être humain.

II.      DES VERSETS CORANIQUES RELATIFS AU REPENTIR ET AU PARDON DES PÉCHÉS

Il nous est dit dans le Coran que «C’est Lui qui a fait descendre sur toi le Livre : il s’y trouve des versets sans équivoque, qui sont la base du Livre, et d’autres versets qui peuvent prêter à d’interprétations diverses. Les gens, donc, qui ont au cœur une inclinaison vers l’égarement, mettent l’accent sur les versets à équivoque, cherchant la dissension en essayant de leur trouver une interprétation, alors que nul n’en connaît l’interprétation, à part Allah. Mais ceux qui sont bien enracinés dans la science disent : “Nous y croyons : tout est de la part de notre Seigneur ! ” Mais, seuls les doués d’intelligence s’en rappellent. » (S 3 V 7) 

Comme il existe des versets coraniques à équivoque dont « nul n’en connaît l’interprétation, à part Allah », l’existence de hadiths à équivoque ou de hadiths porteurs d’invocations à équivoque pouvant, du fait d’une mauvaise interprétation par des non-initiés, faire naitre le doute ou une attente « excessive » de la miséricorde divine, est somme toute normale.

Aboû Moh ‘ammed el-H’assan ben ‘Ali ben Abi Tale descendant de l’Envoyé de Dieu (que Dieu soit satisfait de lui et de son père) a dit : « J’ai retenu ceci de l’Envoyé de Dieu (à lui, bénédiction et salut) : « Laisse ce qui te jette dans le doute…pour ce qui ne t’y jette pas ». (Hadith 11N) L’attention des croyants est donc appelée sur l’attente abusive de la miséricorde divine fondée sur une interprétation permissive des hadiths à équivoque ou de hadiths porteurs d’invocations à équivoque susmentionnés.

Ci-dessous sept (7) versets coraniques sans équivoque au sujet du pardon des péchés, à l’aune desquels tous les hadiths relatifs au pardon des péchés devraient être interprétés. Tout hadith qui n’admet pas une interprétation justifiant sa conformité, sans aucun doute, avec les dispositions des versets coraniques ci-après doit être rejeté par tous ceux qui n’aiment pas les facilités et qui ont l’esprit tourné vers le bien.

1.       «Ceux qui vendent à vil prix leur engagement avec Allah ainsi que leurs serments n’auront aucune part dans l’au-delà, et Allah ne leur parlera pas, ni les regardera, au Jour de la Résurrection, ni ne les purifiera ; et ils auront un châtiment douloureux. » (S 3 V 77)

2.       « Allah accueille seulement le repentir de ceux qui font le mal par ignorance et qui aussitôt se repentent. Voilà ceux de qui Allah accueille le repentir (…) » (S 4 V 17)

3.       «Certes Allah ne pardonne pas qu’on Lui donne quel qu’associé. A part cela, Il pardonne à qui Il veut. (…). » (S 4 V 48)

4.       «Certes, Allah ne pardonne pas qu’on Lui donne des associés. A part cela, Il pardonne à qui Il veut. Quiconque donne des associés à Allah s’égare, très loin dans l’égarement. » (S 4 V 116)

5.       « (…) quiconque d’entre vous a fait un mal par ignorance, et ensuite s’est repenti et s’est réformé… Il est, alors, Pardonneur et Miséricordieux”. » (S 6 V 54)

6.       « Puis ton Seigneur envers ceux qui ont commis le mal par ignorance, et se sont par la suite repentis et ont amélioré leur conduite, ton Seigneur, après cela est certes Pardonneur et Miséricordieux. » (S 16 V 119)

7.       « (…). Nul blâme sur vous pour ce que vous faites par erreur, mais vous serez blâmés pour ce que vos cœurs font délibérément. (…). » (S 33 V 5)

Nous donnons aussi ci-après des versets coraniques et des hadiths complémentaires qui devraient fonder toute réflexion sur le repentir et le pardon des péchés par « Le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux » :

1.       « (…). Mais quiconque récidive…alors les voilà, les gens du Feu ! Ils y demeureront éternellement. » (S 2 V 275)

2.       « Et concourez au pardon de votre Seigneur, et à un Jardin (paradis) large comme les cieux et la terre, préparé pour les pieux, (…) ceux qui, (…) se souviennent d’Allah et demandent pardon pour leurs péchés (…) et qui ne persistent pas sciemment dans le mal qu’ils ont fait. Ceux-là ont pour récompense le pardon de leur Seigneur, (…). Seigneur ! Nous avons entendu l’appel (…) et dès lors nous avons cru. (…) pardonne-nous nos péchés, efface de nous nos méfaits, et place nous, à notre mort, avec les gens de bien. » (S 3 V 133, 135, 136, 193)

3.       «Ceux qui ont fait du tort à eux-mêmes, les Anges enlèveront leurs âmes en disant : “Où en étiez-vous ?” (à propos de votre religion) – “Nous étions impuissants sur terre”, dirent-ils. Alors les Anges diront : “La terre d’Allah n’était-elle pas assez vaste pour vous permettre d’émigrer ? ” Voilà bien ceux dont le refuge est l’Enfer. Et quelle mauvaise destination ! A l’exception des impuissants : hommes, femmes et enfants, incapables de se débrouiller, et qui ne trouvent aucune voie : A ceux-là, il se peut qu’Allah donne le pardon. Allah est Clément et Pardonneur. » (S 4 V 97 à 99,)

4.       «Quiconque agit mal ou fait du tort à lui-même, puis aussitôt implore d’Allah le pardon, trouvera Allah Pardonneur et Miséricordieux. » (S 4 V 110)

5.       «115Et quiconque fait scission d’avec le Messager, après que le droit chemin lui est apparu et suit un sentier autre que celui des croyants, alors Nous le laisserons comme il s’est détourné, et le brûlerons dans l’Enfer. Et quelle mauvaise destination ! » (S 4 V 115)

6.       « ô les croyants ! (…). Allah a pardonné ce qui est passé ; mais quiconque récidive, Allah le punira. Allah est Puissant et Détenteur du pouvoir de punir. » (S 5 V 95)

7.       « (…) ceux qui ne croient pas (…), s’ils cessent, on leur pardonnera ce qui s’est passé. Et s’ils récidivent, ils seront châtiés (…). » (S 8 V 38)

8.       « D’autres ont reconnu leurs péchés, ils ont mêlé de bonnes actions à d’autres mauvaises. Il se peut qu’Allah accueille leur repentir. (…).» (S 9 V 102)

9.       Et accomplis la Salat aux deux extrémités du jour et à certaines heures de la nuit. Les bonnes œuvres dissipent les mauvaises. Cela est une exhortation pour ceux qui réfléchissent. (S 11 V 114)

10.     « “Si vous faites le bien, vous le faites à vous-mêmes ; et si vous faites le mal, vous le faites à vous [aussi]”. (…). Il se peut que votre Seigneur vous fasse miséricorde. Mais si vous récidivez, Nous récidiverons. Et Nous avons assigné l’Enfer comme camp de détention aux infidèles. » (S 17 V 7, 8)

11      « Votre Seigneur connaît mieux ce qu’il y a dans vos âmes. Si vous êtes bons ; Il est certes Pardonneur pour ceux qui Lui reviennent se repentant. » (S 17 V 25)

12.     « sauf celui qui se repent, croit et accomplit une bonne œuvre ; ceux-là Allah changera leurs mauvaisesactions en bonnes, et Allah est Pardonneur et Miséricordieux ;et quiconque se repent et accomplit une bonne œuvre c’est vers Allah qu’aboutira son retour. » (S 25 V 70, 71)

13.     « Mais celui qui se sera repenti, qui aura cru et fait le bien, il se peut qu’il soit parmi ceux qui réussissent. » (S 28 V 67)

14.     « Dis : “ô Mes serviteurs qui avez commis des excès à votre propre détriment, ne désespérez pas de la miséricorde d’Allah. Car Allah pardonne tous les péchés. Oui, c’est Lui le Pardonneur, le Très Miséricordieux” ». (S 39 V 53)

15.     « (…)  Repentez-vous à Allah d’un repentir sincère. Il se peut que votre Seigneur vous efface vos fautes et qu’Il vous fasse entrer dans des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, le jour où Allah épargnera l’ignominie au Prophète et à ceux qui croient avec lui. (…).» (S 66 V 8)

16.     « Certes, Dieu à cause de moi, pardonnera à ma communauté les péchés commis par erreur, oubli ou contrainte ». » (Hadith 39N)

17.     « Quiconque a fait une injustice à quelqu’un, concernant sa réputation ou autre chose, doit le supplier de lui pardonner son méfait avant le Jour de la Résurrection où il n’y aura pas de monnaie en récompense des mauvaises actions. Mais s’il a fait de bonnes œuvres, on les lui supprimera selon l’injustice qu’il aurait commise. Et s’il n’a pas fait de bonnes œuvres, les péchés de la personne opprimée lui seront attribués ». (Hadith 1118 / S.B. 1903)

18      « Par Dieu ! J’implore le pardon de Dieu et me tourne vers Lui en me repentant plus de soixante-dix fois par jour !» (Hadith 2071 / S.B. 6307)

19.     « Un croyant considère ses péchés comme une montagne sous laquelle il est assis et dont il craint qu’elle ne s’écroule sur sa tête. En revanche, le méchant considère ses péchés comme des mouches qui passent devant son nez et qu’ils chassent loin de lui, d’un geste de la main. »

« Dieu se réjouit du repentir de Son serviteur (de sa créature) plus que ne se réjouit un homme qui installe son camp dans un endroit dangereux, avec sa monture transportant ses vivres et son eau, puis qui repose sa tête, fait un petit somme et se réveille ensuite pour trouver que sa monture a disparu; il se met alors à sa recherche, endurant la canicule et la soif ou tout ce que Dieu veut, puis il dit je vais revenir au campement; de retour, il s’endort, puis se réveille et relevant la tête il trouve sa monture debout à ses côtés ». (Hadith 2072 / S.B. 6308)

20.     « Vous ne devez pas dire « Ô Dieu pardonne-moi si Tu veux ! O Dieu ! Sois Miséricordieux pour moi si Tu veux !» Mais vous devez invoquer Dieu avec détermination, personne ne pouvant obliger Dieu à faire une chose contre Sa volonté ! » (Hadith 2077 / S.B. 6338)

21.     « Si le mécréant savait toute la miséricorde que Dieu détient, il ne perdrait pas l’espoir d’entrer au Paradis ; et si le croyant savait tout le châtiment que Dieu a, il ne se considérerait pas en sécurité contre le Feu de l’Enfer. » (Hadith 2106 / S.B. 6469)

Tout croyant, dont l’esprit est tourné vers le bien et le culte du mérite, convaincu que la vie est un combat perpétuel, conscient des exigences d’une bonne adoration pour laquelle Dieu l’a créé et persuadé que ce sont les œuvres (bonnes et mauvaises) qui seront déterminantes quand l’Heure (du jugement) arrivera, fera certainement preuve de prudence en ce qui concerne l’effacement des péchés et s’en tiendra aux règles et principes coraniques relatifs au repentir : Regretter ses fautes précédentes ; Ne jamais retarder le repentir, ni le remettre ; Prendre la résolution, pour le reste de sa vie, de ne jamais récidiver ; Réparer l’ensemble des injustices commises auprès des victimes (réparer les dommages matériels et/ou se décharger du dommage moral).

III.    LA « SCIENCE DES PREALABLES »

Le repentir est incontestablement la source principale de l’effacement des péchés dont quelques-uns sont aussi effacés par les épreuves pieusement endurées. Cependant les clauses du repentir étant mal comprises, ou non respectées scrupuleusement, nous avons de nombreux musulmans sénégalais qui vivent dans la récidive permanente de la commission de mauvaises œuvres qui empêchent la satisfaction par « Le Pardonneur » de leurs prières ou invocations, ou justifient le fait que Dieu les laisse s’enfoncer davantage dans la perversité dont pâtissent leurs âmes.

C’est pourquoi nous avons évoqué la notion de «science des préalables» qui consiste, d’abord à se convaincre que l’effacement des péchés est indissociable du repentir et c’est pourquoi le Messager de Dieu (PSL) « implorait le pardon de Dieu et se tournait vers Lui en se repentant plus de soixante-dix fois par jour »;ensuite bien savoir que le repentir a des exigences parmi lesquelles les plus importantes sont la sincérité, excluant toute intention secrète de récidiver, et l’obligation de réparer les dommages matériels et immatériels causés, et enfin être conscient du fait que le repentir doit aussi être fait pour les péchés que vous avez pu commettre sans vous en rendre compte et qui sont très probablement ces péchés mineurs commises par inadvertance. C’est d’ailleurs la seule chose qui peut expliquer l’importance du nombre de fois que le Prophète se repentait par jour, même si notre conviction est que le Prophète, modèle parfait des musulmans agissait de la sorte, non parce qu’il était préoccupé par ses péchés mineurs, mais simplement parce qu’il voulait montrer aux croyants l’importance du repentir.

Cette «science des préalables» est fort heureusement en phase avec «les Conditions et règles garantissant l’efficacité des prières (dou’a)1 de type Al-Ghazâlî» abordées par Constant Hamès dans son article intitulé «Entre recette magique d’Al-Bûnî et prière islamique d’Al-Ghazali: textes talismaniques d’Afrique occidentale»2 qui peuvent être entendues comme des préalables à la satisfaction par Allah des prières, des invocations et autres demandes sous des formes diverses qui Lui sont adressées dans le cadre de la prévention des maladies, de la guérison des maux, de la quête d’une purification de l’âme par l’effacement des péchés et de la recherche de plus de bonheur par plus de santé, de réussite, de cohésion familiale, de richesses, etc.

Nous transcrivons ci-après « La condition de disposition intérieure » qui est la dixième (X), relative au repentir et qui serait la plus importante au vu de la manière dont elle est formulée : « X. La Condition de disposition intérieure (al-adab al-bâtin). Le demandeur doit être en état de contrition, de repentir, de retour à Allah (tawba). C’est l’attitude fondamentale (al-asl) pour que la demande soit reçue, le sine qua non pour qu’elle soit exaucée. Al-Ghazâlî utilise une expression très précise : « C’est la cause immédiate de la réalisation du vœu » (huwa as-sabab al-qarîb fî l-ijâba). »

Cette « condition de disposition intérieure » formulée par Al-Ghazâlî nous conforte dans notre ferme conviction que l’effacement des péchés commises surtout contre des personnes physiques et morales est subordonné au « repentir sincère » et nous permet de mieux percevoir la dangerosité de cette large vulgarisation d’invocations et de prières « dévoreuses de péchés » sans aucune indication sur les conditions de leur acceptation par « Le Pardonneur » que personne ne peut contraindre.

Afin d’aider modestement des musulmans à sortir de leur égarement et à se prémunir contre une « abusive espérance de la miséricorde divine » pouvant les conduire à une perte évidente le « Jour de la Reddition des comptes », nous partageons ci-après notre intime conviction sur les attitudes souhaitables découlant de l’exploitation de nombreux versets coraniques et des hadiths et que nous allons articuler autour des trois points suivants : d’abord « Ce qui doit être retenu par les croyants» à propos de l’adoration, du repentir et des invocations destinées à l’effacement des péchés, ensuite une tentative d’identification de  « Ceux dont les invocations, les prières et les repentirs sont susceptibles d’être acceptés » et enfin ; « L’attitude desmarabouts, guides religieux, Imams et prêcheurs» au regard de leur devoir patriotique de contribuer à la lutte contre la crise morale.

IV.       LES ATTITUDES SOUHAITABLES

IV.1. Ce qui doit être retenu par les croyants

Tout croyant, dontl’esprit et le cœur sont irréversiblement tournés vers le bien reconnait que :

1.       Dieu l’a créé pour qu’il L’adore et la vie est un combat perpétuel ;

2.       Ce sont les œuvres (bonnes et mauvaises) qui seront déterminants quand l’Heure (du Jugement) arrivera, car Dieu rémunérera les serviteurs exclusivement d’après leurs actes ;

3.       Ceux qui accomplissent les bonnes œuvres ne seront pas traités comme ceux qui commettent les mauvaises actions et les pieux n’auront pas le même sort que les pervers ;

4.       Les invocations pour l’effacement d’un péché lié au dommage matériel ou moral causé à une personne morale ou physique sont irrecevables sans un repentir sincère comportant un véritable retour vers Dieu par le cœur, l’esprit, la langue et les actes et la réparation du préjudice causé ;

5.       Témoigner sincèrement et du fond du cœur qu’il n’y a de dieu que Dieu et que Mohammad est le Messager de Dieu commande, sans aucun doute, le respect des prescriptions et proscriptions du Créateur ;

6.       Aimer véritablement les Prophètes, les véridiques, les saints et les vertueux, ce n’est pas faire leurs louanges, mais c’est surtout les imiter dans tous les aspects de leur vie sur terre ;

7.       L’amour du prochain, deuxième fondement de la religion après l’adoration exclusive de Dieu, doit être le principal motif de la commission de bonnes actions et du rejet de tout préjudice à causer aux personnes physiques et morales ;

8.       Le repentir est de nul effet si l’intéressé au moment de se repentir est intérieurement convaincu qu’il commettra à nouveau le même péché ;

9.       Dieu Pardonneur, Miséricordieux mais, « dur en punition », « prompt en punition », n’accepte certainement pas les récidives volontaires et ne peut pardonner systématiquement à « ceux qui ont encouru Sa colère » ou qui parce qu’ils sont « égarés » persistent dans leurs transgressions ;

10.     L’espoir d’avoir obtenu l’acceptation de ses invocations pour l’effacement de ses péchés doit être un motif d’encouragement à mieux se comporter et non une source de relâchement au risque de faire partie des gens de l’Enfer qui ont été clairement spécifiés. Ceci est surtout valable pour des « rapprochés d’Allah » qui penseraient pouvoir abandonner des prescriptions coraniques. Dieu n’a donné aucune astuce, aucune ficelle aucune clef, aucun secret, aucun degré de rapprochement avec Lui, qui permettrait d’enfreindre sciemment Ses Ordres et interdits ;

11.     La foi comporte plusieurs degrés dont le sommet est atteint par un nombre très restreint de croyants qui alors sont en parfaite communion avec Dieu qui devient pour chacun d’eux «la vue avec laquelle il voit, la main avec laquelle il saisit, la jambe avec laquelle il marche et à qui Il donne tout ce qu’il lui demande et lui accorde la protection qu’il espère. Ces derniers qui font partie des principaux vicaires de Dieu pour la bonne gestion des affaires terrestres ont l’obligation de demeurer des exemples de piété ;

12.     Quel que soit son rang sur cette terre, l’Homme a le devoir de donner le meilleur de lui-même pour bien le tenir, comme une exigence de son adoration du Créateur, et ceci lui permet d’optimiser ses chances de voir ses invocations et prières être acceptées.

IV.2. Ceux dont les invocations et les repentirs sont susceptibles d’être acceptés.

Les invocations, les prières et les repentances pour être profitables doivent être faites avec sincérité par des Serviteurs de Dieu qui :

1.       Acceptent Dieu comme leur Maitre suprême et le Prophète comme leur parfait modèle. Sont soumis à Dieu, ne Lui associent rien (personne physique ou idoles des temps modernes), Lui font confiance et font de Lui le Seul destinataire de leurs invocations et de leurs demandes, quelle que soit la nature (protection, soutien face aux diverses difficultés de la vie sur terre, …) ;

2.       Sont membres du « Parti d’Allah » et, contrairement aux méchants, aux injustes, aux menteurs, aux hypocrites, aux ingrats et aux intempérants qui sont membres du « parti du diable banni », ils s’évertuent à respecter scrupuleusement les prescriptions et proscriptions du Plus Haut et luttent contre eux-mêmes pour ne pas commettre les grands péchés et les turpitudes.

3.       Prennent exemple sur le Prophète (PSL) qui, pour montrer que la miséricorde divine ne doit pas être considérée comme définitivement acquise, se retournait vers Dieu et se repentait au moins soixante-dix fois par jour ;

4.       Se battent contre eux-mêmes pour que la commission de bonnes œuvres et le rejet des mauvaises soient l’expression continue de leur foi ;

5.       Font preuve de sagesse, en ce qui concerne le repentir et l’effacement des péchés par les invocations, s’en tenant à celles qui, sans aucun doute, sont conformes aux principes coraniques et aux clauses spécifiées ;

6.       Ne « profitent pas des situations » pour s’enrichir illicitement et/ou commettre de nombreuses injustices et autres turpitudes ;

7.       Ne font pas partie des hypocrites, des méchants, des injustes et des mécréants qui persistent dans leur égarement, combattant dans le sentier du diable et ne s’allient pas avec eux ;

8.       Font des efforts pour acquérir la « science du bien et du mal » afin de minimiser la commission des péchés par ignorance ;

9.       Luttent avec l’« épée de l’Esprit » dans le chemin d’Allah notamment pour la victoire du bien sur le mal et contre tout ce qui, de manière abusive, les empêche de remplir leur devoir d’adoration dans le respect des lois et règlements de la République ;

10.     Ne commettent pas des péchés sciemment ou délibérément et ne récidivent pas ;

11.     Ne croient jamais que l’entrée au Paradis leur est définitivement acquise ;

12.     Multiplient leurs bonnes actions afin d’avoir, quand l’Heure arrivera de quoi acquitter le droit de chacune des personnes à qui il aura porté préjudice inconsciemment.

IV.3. L’attitude des « sachants » au regard de la crise morale.

Dans notre pays, en proie à une crise morale avec des conséquences désastreuses, la lutte contre ce fléau doit être une sur-priorité. L’heure doit être, d’une part à un retour véritable à l’injonction donnée à la communauté musulmane et principalement aux chefs religieux, aux érudits, aux prêcheurs, aux Imams, aux autres acteurs d’éducation religieuse, aux leaders au service de l’Etat et à tous les patriotes « d’ordonner le convenable et de condamner le blâmable ». Ils doivent aussi donner la primauté aux paroles qui dissuadent, qui conscientisent, qui montrent que l’adoration d’Allah, qui doit être effective dans toutes les œuvres humaines, n’est pas un jeu. Ils doivent faire comprendre que cette adoration, qui est une obligation pour tout croyant, requiert un combat continu contre soi-même et une vigilance permanente pour bien se conduire. Ils doivent lutter contre la vulgarisation d’invocations et de prières sans précision des préalables à leur éventuelle acceptation et contre la diffusion d’informations contraires aux prescriptions coraniques qui égarent ou qui, mal exploitées, conduisent au « libertinage religieux » et à une surabondance des péchés qui peuvent attirer sur le pays une sanction divine.

Les chefs religieux, les érudits, les prêcheurs et les autres acteurs d’éducation religieuse patriotes devraient donc, pour contribuer au retour vers Dieu et à l’amélioration de la santé morale des sénégalais, se pencher sur cette «science des préalables» et s’accorder sur les conditions d’acceptation éventuelle par Dieu du repentir, des invocations et des prières surérogatoires qui effacent les péchés afin de tenir un langage harmonisé dans lequel il n’y aura plus de doute sur la primauté des efforts individuels et de l’accomplissement des bonnes œuvres, et pouvoir ainsi mettre fin à ce grand mal que constituent les conséquences susmentionnées.

En œuvrant dans ce sens, ils poseront incontestablement un important acte d’adoration car Dieu veut que Ses serviteurs, Ses soldats fassent « la seule bonne apologie de la transhumance » qui est celle qui, par « La Parole de Dieu », qui est amour, vérité, justice et équité, arriverait à transformer les cœurs et les esprits d’un maximum de membres du « parti du diable banni », et les amener à rejoindre le « Parti d’Allah » de manière irréversible.

Enfin, nous affirmons que face à une crise morale destructrice des sentiments d’amour pour les « frères et sœurs en Dieu » et de patriotisme (cet amour pour la Patrie), les sénégalais, gagneraient à se prémunir contre toute « abusive espérance de la miséricorde divine » et devraient rivaliser dans l’accomplissement des bonnes œuvres. Evidemment, cette prudente et sage attitude n’exclut cependant pas le maintien des prières et des invocations surtout quand elles sont destinées, à la quête d’un soutien face aux difficultés de la vie, à la protection contre le mal émanant des injustes, des jaloux, des envieux et des méchants ; à la fortification et à l’inspiration pour la bonne exécution de ses devoirs envers Dieu, envers toutes les personnes physiques et morales et envers l’environnement et toutes les utilités communes

Notes

1:    «Le dou’a est un acte d’invocation. Lorsqu’on fait un dou’a, on fait appel à Allah, on Lui parle et invoque nos attentes, nos désirs et nos espoirs, Son aide, Le supplie d’être miséricordieux envers nous, Lui demande pardon, etc »

https://www.l-islam.com/le-dogmes-islamique/dou-a

2:    https://journals.openedition.org/span/1344

« Entre recette magique d’Al-Bûnî et prière islamique d’Al-Ghazali: textes talismaniques d’Afrique occidentale», Constant Hamès, UPR 17 (Groupe de sociologie des religions) – CNRS /

Colonel (retraité) Tabasky Diouf

tabou@jogngirsenegal.sn

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