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Déclaration commune

18 janvier 2024 | 0 commentaires

A l’issue de la rencontre citoyennetenue le 17 janvier 2024, à l’initiative de Jóg ngir Senegaal, portant notamment sur l’évaluation du contrôle des parrainage, nous participants déclarons ce qui suit :

1. Constatons que notre pays qui était jadis un exemple de démocratie et de respect des droits de l’homme est en train de perdre son prestige du fait d’un nombre trop important de décisions administratives et judiciaires antidémocratiques ou attentatoires au principe d’égalité devant la loi de tous les citoyens ».

2. Notons que le parrainage étant optionnel, le fait que le candidat de la mouvance présidentielle ait finalement opté pour un parrainage par les élus après avoir enrôlé un nombre important de parrains constitue un acte antidémocratique.

3. Affirmons que le parrainage n’a pas atteint son objectif parce qu’entre autres, des candidats dont la représentativité est prouvée par les résultats obtenus aux dernières élections locales ou législatives, n’ont pas pu passer le contrôle du parrainage dont la fiabilité et l’objectivité sont négativement impactés par le hasard et la chance.

4. Condamnons le fait qu’à la date du 6 janvier 2024, la Commission électorale nationale autonome (CENA) qui, en vertu de l’article L.11. du Code électoral, joue un rôle central dans le processus électoral n’ait pas eu le fichier électoral mis à jour, comme nous désapprouvons le fait que le Conseil constitutionnel ait très certainement effectué le contrôle des parrainages avec un fichier non mis à jour ou corrompu :

5.  Exprimons notre totale désapprobation du rejet de la candidature de certains candidats pour « fichier de parrainage non exploitable » et affirmons que cette non exploitabilité ne devait pas être imputée aux candidats et être un obstacle au contrôle de leurs parrainages dans la mesure où il était possible d’exploiter les fichiers électroniques qui étaient déjà enregistrés dans l’ordinateur au moment du dépôt. En effet l’article 3 de la décision no 1/E/2023 du 24 novembre 2023 dispose : en ses alinéas 2 à 4 : « Lors du dépôt du dossier de déclaration de candidature, le chef du greffe, assisté d’un informaticien du Conseil constitutionnel, fait procéder, sans délai, à l’ouverture, à la visualisation et à l’enregistrement chiffré, aux fins de sauvegarde de l’intégrité des données, du fichier électronique contenant la liste des parrains, en présence du mandataire concerné, du candidat indépendant ou de son représentant, lesquels peuvent se faire assister d’un technicien de leur choix. Le chef du greffe établit un récépissé de dépôt faisant l’inventaire des pièces reçues et sur lequel sont apposées sa signature et celle du déposant. Il en est délivré copie à ce dernier. Tout vice affectant le fichier électronique fait l’objet d’une mention sur le récépissé de dépôt. » Dès lors qu’aucun vice n’a été mentionné sur le récépissé de dépôt de candidature remis aux candidats, le motif de non-exploitabilité des fichiers électroniques ne devait pas leur être imputé.

6. Réprouvons le fait qu’avec la mise en place du parrainage en 2018, les pouvoirs, exécutif et judiciaire, aient encouragé depuis 2019 une pratique consistant à parrainer, plus d’un candidat ou d’une liste de candidats, en ne prenant pas des sanctions en application de l’article L.91. du code électoral, pour ensuite opposer l’existence de doublons externes aux candidats à l’élection présidentielle du 25 février 2024.

7.  Remarquons la grande injustice dont sont victimes les candidats indépendants, ainsi que ceux des partis peu représentés à l’Assemblée nationale et dans les exécutifs territoriaux, suite à l’introduction en 2023 du parrainage par les élus (députés, présidents de conseil départemental et maires) dans le système, alors que c’est l’esprit de justice entre tous les candidats qui avait été présenté en 2018 comme justificatif de l’extension du parrainage aux candidats, ou listes de candidats, présentés par des partis politiques légalement constitués. Notons que la logique aurait voulu que les élus municipaux dont le nombre est un indicateur de la représentativité d’un parti ou coalition de partis politiques soient aussi pris en compte.

8. Déplorons les dysfonctionnements dans le contrôle des parrainages qui ont portés, notamment, sur le fait que des parrains qui disposent de leur carte d’identité nationale comportant au verso les données électorales, aient été déclarés absents du fichier électoral ayant servi au contrôle des parrainages. Face à cette situation, le Président du Conseil constitutionnel aurait dû, par souci de transparence et de justice, suspendre les contrôles et exiger que le fichier électoral mis à jour lui soit transmis.

9. Regrettons que l’Etat du Sénégal n’ait ni exploité, avec un esprit positif, le rapport de l’Union européenne relatif à l’élection présidentielle de 2019, ni exécuté l’arrêt de la Cour de justice de la CEDEAO d’avril 2021. Si tel était le cas, les dysfonctionnements constatés dans le système de contrôle des parrainages, et son caractère trop aléatoire qui éloigne manifestement de l’objectif visé, seraient évités.

10. Observons le recul démocratique que représente l’arrêt de la mise en ligne du fichier électoral qui était effectif jusqu’en 2012 et faisons remarquer dans ce sens la remise en cause (de fait) par l’article 49 du code électoral du « droit de regard et de contrôle du fichier électoral » qu’ont la CENA et les partis politiques, en disposant notamment que « (..). La C.E.N.A ainsi que les partis politiques légalement constitués ont un droit de regard et de contrôle sur la tenue du fichier. Les modalités pratiques d’exercice de ce droit de regard et de contrôle de la CENA et des partis politiques légalement constitués sur le fichier ainsi que ses conditions d’organisation et de fonctionnement sont déterminés par décret. » Le décret qui doit permettre l’exercice de ce droit tarde en effet à être pris, alors que l’article 46 du code électoral de 1992 (Loi n°92-16 du 07 Février 1992 portant Code Electoral modifiée) et l’article 48 de celui de 2017 (loi n°2017/12 du 18 janvier 2017 modifiée) mettaient enexergue ce droit en indiquant simplement qu’« Un décret détermine les conditions d’organisation et de fonctionnement de ce fichier» et non des « des modalités pratiques d’exercice de ce droit de regard et de contrôle ».

11. Soulignons que la manipulation des fichiers électroniques de candidats, qui serait commise, d’initiative ou sur instruction, par les informaticiens du Conseil constitutionnel, doit faire l’objet d’une enquête afin que les sanctions idoines soient prises. A cet effet nous soutenons toute action que les concernés par ce méfait dommageable décideront de mener.

Nous formulons les recommandations suivantes qui devraient être mises en œuvre en extrême urgence par la Commission électorale nationale autonome (CENA) en rapport avec les Organes du Ministère chargé des élections en vue d’améliorer l’organisation de l’élection présidentielle du 25 février 2024 qui doit être libre, honnête transparente et paisible :

1. L’audit du fichier étant possible en trois (3) jours selon des experts, nous invitons la CENA à prendre ses responsabilités, pour qu’en rapport avec la DAF et la DGE, elle choisisse des experts sénégalais qui vont procéder rapidement à cet audit avant le tirage des listes électorales et la finalisation de la carte électorale, pour notamment, identifier les insuffisances actuelles du fichier électoral ; veiller à ce que les centaines de milliers de citoyens disposant d’une carte d’électeur et qui ont été déclarés absents du fichier soient réintroduits s’ils sont réellement absents du fichier mis à jour, et vérifier si ceux qui se sont inscrits lors de la dernière révision exceptionnelle des listes électorales (notamment les primo-votants) disposent des cartes d’électeurs qui leur permettront de voter.

2. Même si le numéro vert  800-00-2017  de la Direction de l’Automatisation des Fichiers (DAF) est fonctionnel au profit des citoyens du lundi au vendredi de 08h00 à 18h00 et le samedi de 08h00 à 17h00 pour la vérification de leur inscription sur le fichier électoral, il importe pour améliorer la transparence du processus électoral que le Gouvernement réactive le moteur de recherche  www.elections.sn qui était actif jusqu’en 2012 et permettait aux électeurs de vérifier leurs données électorales dans le fichier électoral.

3. La CENA doit s’assurer en rapport avec la Direction Générale des élections (DGE) et la DAF que les électeurs qui ont changé de bureau, voire même de lieu de vote, notamment à la suite des dernières inscriptions puissent en être informés ou que des dispositions soient prises dans ce sens par des affiches au niveau des lieux de vote au plus tard la veille du scrutin.

4. Recommandons la mise en œuvre d’actions vigoureuses pour l’apaisement et la décrispation de la tension politique latente qui passeraient par la libération des personnes mises sous mandat de dépôt pour des délits d’opinion, y compris ceux figurant sur la liste des candidats admis à se présenter à l’élection présidentielle du 25 février 2024, donnée par l’article 3 de la Décision no1/E/2024 du 12 janvier 2024 du Conseil constitutionnel

A l’issue de l’élection présidentielle du 25 février 2024, les mesures additionnelles suivantes devraient être prises afin de renforcer la démocratie et la crédibilité de l’Etat du Sénégal :

1. Avec son extension en 2018 aux partis politiques et coalitions de partis politiques, le parrainage est devenu une étape cruciale du processus électoral. En conséquence, des mesures auraient dû être prises, avec une éventuelle modification du code électoral, pour que le fichier électoral soit accessible aux candidats à la candidature. Le fichier pourrait être paramétré de telle sorte que la connaissance du statut de l’électeur (a ou n’a pas déjà parrainé) permette d’éviter les doublons externes pour les prochaines élections, si le système actuel de parrainage est maintenu.

2. En ce qui concerne le « droit de regard et de contrôle du fichier électoral » qu’ont la CENA et les partis politiques, il importe de modifier l’article 49 du code électoral qui disposerait notamment que « Le Ministère chargé des Elections fait tenir le fichier général des électeurs, en vue du contrôle des inscriptions sur les listes électorales. La C.E.N.A ainsi que les partis politiques légalement constitués ont un droit de regard et de contrôle sur la tenue du fichier. Un décret détermine les conditions d’organisation et de fonctionnement de ce fichier ». En attendant, le décret prévu par les dispositions actuelles de l’article 49 (voir point 10.ci-dessus) devrait être pris en urgence.

3. Pour sortir définitivement des problèmes récurrents rencontrés dans le contrôle des parrainages, le système actuel de parrainage pourrait être remplacé par une procédure alternative, plus simple et plus efficace, fondée sur la rationalisation des partis politiques, en application des dispositions légales et règlementaires en vigueur et l’élaboration d’une nouvelle loi prévue par l’article 4 de la Constitution qui subordonnerait la création des partis politiques à des conditions plus restrictives ;  la limitation de la recherche de parrains aux candidats indépendants comme ce fut le cas avant 2018, et l’activation de la fonction de « Ministre chargé des élections » (prévue par le code électoral) qui serait incompatible avec l’appartenance à un parti politique.

Ont signé la présente « Déclaration commune »

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