Des formations adéquates pour des « chaebol » sénégalais

6 août 2024 | 2 commentaires

Depuis l’indépendance, le Sénégal inclut toujours des politiques industrielles dans ses programmes de développement.

Dans ces politiques, on fait référence surtout à la politique de substitution à l’importation et de promotion de la création des petites et moyennes entreprises, à la politique de redéploiement industriel, et celle d’industrialisation découlant du Plan Sénégal émergent.

Malgré ces efforts consentis par les gouvernements successifs pour rendre le Sénégal compétitif à l’échelle sous-régionale et sur le plan international, les résultats escomptés restent insuffisants. Beaucoup de potentiels susceptibles d’apporter de la valeur ajoutée réelle demeurent inexploités, comme la manufacture, l’écosystème numérique et la fabrication d’automobiles. Ainsi, le développement économique du pays pourrait, entre autres, se reposer sur un secteur secondaire fort afin de remédier aux problématiques et défis urgents, tels que ceux relatifs à l’industrialisation, à l’autosuffisance alimentaire, à l’éradication de la pauvreté, à la réduction du taux de chômage et à l’optimisation de la production pétrolière et gazière.

 A cet égard, créer notre cœur de métier est une étape cruciale et fondamentale pour nos aspirations à occuper une place importante dans la chaine de valeur mondiale et pour booster notre croissance économique, à l’image du modèle sud-coréen.

Cela requiert impérativement l’existence d’un capital humain de qualité, d’où la nécessité de ne plus se contenter exclusivement de l’enseignement classique pour se tourner vers des formations professionnelles rigoureuses dans les domaines scientifique, technique et numérique.

En effet, les Sud-Coréens ont très tôt compris cela. D’ailleurs, c’est ce qui les a poussés à mettre en place et à développer après 1960, dans leur processus de développement rapide du pays, plusieurs lois et plans, englobant toujours des stratégies de développement de la science et de la technologie permettant de pourvoir les industries de la main-d’œuvre et la ressource humaine qualifiées adaptées à la situation économique du pays à toute époque. De ce fait, les industriels ont pu rendre prospères leurs usines, certes en s’appuyant aussi sur d’autres facteurs. Pareilles options ont débouché sur ce qu’ils appellent les « Chaebol », l’atout maitre de l’économie sud-coréenne.

Avec ce concept, la Corée du sud, à travers les géants Hyundai Motor Group, constructeur automobile de renommée, troisième au rang mondial, et Samsung, classée premier vendeur de téléphones mobiles et de smartphones devant Apple, réalise des chiffres d’affaires conséquentes dans l’univers de l’électronique.

C’est dans cette optique qu’elle s’est constitué son propre cœur de métier qui lui donne l’occasion, aujourd’hui, de conquérir tous les marchés du monde.

Pourtant, dans les années 1960, le Sénégal n’avait rien à envier à ce petit pays asiatique en termes de développement. Ils partageaient pratiquement les mêmes niveaux. L’un des dirigeants de Samsung, Monsieur Shin Kim, l’a confirmé lors d’une cérémonie en disant : « Dans les années 1960, les principales exportations de la Corée étaient les produits agricoles et les perruques… Les Coréens étaient tellement pauvres qu’ils devaient vendre leurs cheveux… ».  Mais dans les années qui suivent, la Corée s’est décollée avec des quantités de mouvements remarquables vers des objectifs de développement grâce à ses « Chaebol ». Ce qui marque l’aboutissement des stratégies de développement et de formation scientifique et technologique rigoureuses.

 De notre côté, nous nous sommes pratiquement cloués là où nous étions depuis le lendemain de notre indépendance à cause du système éducatif qui nous a été légué par les colons sans que nous ne songions à le repenser pour mieux relever nos défis relatifs aux politiques d’industrialisation découlant de nos plans référentiels de développement au cours de toutes ces années.

Il apparait de ce qui précède, que nos gouvernants doivent revoir notre système éducatif de fond en comble pour le conformer à nos besoin et défis de l’heure.

Principalement, dans ces grands chantiers de ce siècle, figure la formation d’une expertise hautement qualifiée pour le bénéfice d’une grande industrie afin de mettre en œuvre une véritable politique industrielle.

Sans cela, même avec un programme taillé en or avec les plus grands experts, rien ne sera opérationnel. Ces grands défis requièrent des efforts colossaux de la part de toutes les parties prenantes.

Néanmoins, avant que ce souhait soit concrétisé, j’invite les élèves et étudiants, notamment les nouveaux bacheliers, avec la concertation de leurs parents et encadreurs, à s’orienter vers les formations professionnelles scientifiques, techniques et numériques. Ces compétences leur permettront d’acquérir un métier où une qualification juste en deux ans de formation minimum. Sans cela, ils s’attarderont trop sur l’enseignement classique à travers lequel l’étudiant peut trainer jusqu’à l’obtention de son doctorat sans pouvoir disposer d’une qualification pratique.

Par ailleurs, le fait d’obtenir un baccalauréat littéraire ne constitue pas un obstacle pour se réaliser. Il suffit tout juste de réunir quelques éléments pour exceller.

En effet, nous avons vu un littéraire devenir ingénieur en informatique et intégrer l’Armée nationale de la République du Canada comme officier informaticien.

De même qu’un arabophone obtenir un baccalauréat en littérature arabe et études islamiques et devenir aujourd’hui un éminent et distingué neurologue aux États-Unis d’Amérique.

Les valeurs suivantes demeurent en vérité les seules qui vaillent quelque chose :

  • Rêver grand, car le rêve est permis ;
  • Avoir la volonté et la détermination pour rendre ses rêves réels ;
  • Se concerter avec les bons profils ;
  • Choisir un environnement favorable par rapport à la réalisation de ses rêves ;
  • S’armer de l’endurance, de la persévérance et de l’abnégation ;
  • Établir une feuille de route précise ;
  • Implorer Allah d’une manière constante afin qu’il vous accorde du succès dans les études que vous voulez entreprendre.


En somme, il ne s’agit pas de s’inscrire dans la logique de plaider pour le compte de telle discipline ou tel domaine au détriment d’autres, mais de partager en tant que citoyen une modeste contribution pour participer à la réflexion afférente au devenir de notre patrie.

 En sus, les modèles de réussite susmentionnés nous interpellent sur la nécessité de réformer notre système éducatif, car, rien ne prédestinait, dans les deux modèles de réussite susmentionnés, à devenir ingénieur ou médecin.

Sur le plan intellectuel et sur la formation scientifique, pouvaient-ils concrétiser leurs rêves s’ils étaient dans notre système éducatif après l’obtention du bac ?

Ainsi, cela doit nous pousser aussi à réfléchir davantage sur un autre fléau qui est la fuite des cerveaux. Cela peut entraver la matérialisation de nos aspirations à développer plus que les « Chaebol » sud-coréens, dans notre perspective de bâtir une économie solide et résiliente face aux chocs que traverse notre monde ainsi qu’à l’hégémonie des pays du nord, pour un développement durable et inclusif.

Aboubacar Thiébo CISSE
aboubacre5@gmail.com

2 Commentaires

  1. Ndiaye Diamil

    Très pertinent. Merci

    Réponse
  2. Djibril Dièye

    Salam
    Mr Cissé
    Je vous remercie.
    Il est important de reverser la phrase parfois; je veux dire déterminer les besoins de notre développement et l’adapter à nos formations. Et pourtant il y a même des illétrés devenus inventeurs.
    Il faudra aussi une politique inclusive de communication, créer aussi un pont entre l’enseignement académique et religieuse.
    Et si on prenait des 2 jours de repos des Daaras des heures de formation pratique même artisanale et informatique.
    Il nous faudra aussi une politique de teste de capacité inclus dans le programme scolaire dés le niveau primaire pour une orientation plus facile dés la classe de 6 ème.
    Merci encore.

    Réponse

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