ELection présidentielle 2024 : contribution de Issa KANE

23 mars 2024 | 1 commentaire

Issa KANE dit Silli Demba (•)

Romancier – dramaturge / Dakar

À mes cousins candidats à la présidentielles de mars 2024 :
Amadou (Baïdy Bayal) BA (que je n’ai pas revu depuis 2000)
et
Bassirou Diômay Diakhar FAYE (que je n’ai jamais rencontré).

Dans quelques heures, avec la volonté du Seigneur, comme les quinze autres candidats à l’élection présidentielle, vous allez vous mesurer devant les sénégalais, dans l’isoloir pour choisir leur nouveau président de la république.

Le premier tour ou le second mettra fin à la quasi-similitude de vos parcours universitaire et professionnel (étudiants à l’Université de Dakar, pensionnaires de l’Ecole Nationale d’Administration, fonctionnaires des Impôts et Domaines).

Nous ne pouvons pas occulter vos engagements syndical et politique qui ont fait de vous des hommes dignes de présider aux destinées de ce grand pays de ce grand peuple qui a, toujours, su se faire entendre par les grands pays et les grands peuples de cette turbulente planète terre qui offre chaque jour à ses huit milliards d’habitants des jours de fortune et davantage d’infortune.

Vous êtes tous les deux des sénégalais de sang sur une dizaine de générations, incontestablement. Originaires de Ndiayène Pendao et Loboudou Doué pour Amadou, Ndiandiaye-Ndiaganiao pour Bassirou, les bons sénégalais dans leur infrangible mutisme le savent, laissant aux manipulateurs le loisir d’attribuer d’imaginaires lignées à l’un ou à l’autre. Il faut immoler, une fois pour toutes, l’ethnicisme bête dans ce merveilleux pays.

À mes cousins Babaa’o, Amadou, mangeur insatiable de ʺlacciri e ñebbeʺ et Fayool, Bassirou le bouffeur inextinguible de ʺñelengʺ et de ʺngurbannʺ, vous êtes debout face à l’histoire, face aux foules saoules capiteuses souvent en transe. Vous-mêmes êtes ivres devant les foules d’excités, devant ces hommes, ces femmes ces jeunes garçons et ces jeunes filles qui voient en vous ceux qui vont leur apporter une nouvelle vie porteuse de dignité, d’honorabilité, d’indépendance pour qu’à leur tour, ils puissent manifester solidarité et générosité à qui en a besoin dans la famille, dans le quartier, dans le village, dans la commune. Ils veulent être des femmes et des hommes actifs, productifs, utiles, serviables, disons de bons citoyens.

Ce sont ces femmes, ces hommes, ces jeunes qui ont survécu au COVID-19, qui ont échappé à la mort face aux forces brutales, assassines, qui habitent désormais avec des blessures physiques incurables, une plaie morale indélébile. Des femmes, des hommes et des jeunes aux ventres qui crient famine parce qu’hier, ils n’avaient ni déjeuné ni diné. Des femmes, des hommes et des jeunes qui n’avaient pas pu voir le bon soignant car le ticket de consultation était trop cher. Des femmes et des hommes qui avaient passé une longue nuit d’insomnie car ne sachant pas où trouver de quoi payer les frais de scolarité de leurs enfants le jour de la rentrée des classes. Des pêcheurs qui ne trouvent plus une seule sardine dans la mer juste pour assaisonner la grande marmite familiale. Des jeunes filles et des jeunes garçons trentenaires, quarantenaires qui ne veulent pas se réveiller malgré les rayons du soleil qui chauffent la chambre, honteux de regarder le père et la mère qui ont tout donné depuis le berceau et qui ne peuvent rien recevoir d’eux. Ils ont le diplôme, le savoir, le savoir-faire, la bonne tenue, la vaillance, n’ayant pas de camarade de parti, un oncle, un cousin, un voisin dans les sphères de décision pour leur offrir un emploi, persévérants, endurants, ils attendent la main divine pour les tirer d’affaire, un jour. Désespérés, ils vont rejoindre les centaines de milliers de jeunes qui égrènent leurs chapelets à la manière des vieux retraités pour convoquer la miséricorde divine concernant leur triste sort. Dieu est avec les cœurs purs !

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ont entendu parler de maints crimes financiers et fonciers qui seraient perpétrés par des membres du gouvernement, de grands notables politiques ou de naissance, de hauts fonctionnaires et d’influents opérateurs économiques. D’abominables exonérations fiscales indues qui sont accordées, amicalement, aux riches entrepreneurs à la barbe et à la moustache du peuple. Et notre pétrole ? Et notre gaz ? C’est quand la réduction, l’anéantissement de la pauvreté ?

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ont vu de hauts fonctionnaires défier crânement des arbitres lorsque le verdict rendu par ces derniers n’était pas conforme à leurs attentes, aux attentes des suprêmes décideurs.

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ont vu le patrimoine immobilier de l’état, des terrains appartenant au Domaine National, au Domaine Public Maritime tomber entre les mains des … indignitaires de la République, toute honte bue … jusqu’à la lie pour y édifier des palaces plus enchanteresses que celles des Maharajahs du Rajasthan.

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ont lu, sous le manteau, les rapports des corps de contrôle qui incriminent les éternels intouchables qui les narguent avec leurs voitures rutilantes moins luxueuses que celles de leurs épouses et de leurs enfants que leur envieraient les princesses, les princes saoudiens et les exploitants pétroliers texans.

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes sont agacés par les dérives des thuriféraires et des courtisans de la République qui s’époumonent à injurier les bons et nobles sénégalais qui ne sont pas formés à l’invective, au dénigrement, à la calomnie et au cirage des souliers et des escarpins des détenteurs des décrets et des arrêtés.

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ne veulent pas se contenter du BRT et du TER. Ils veulent avoir le choix entre emprunter ces moyens de transport en commun et conduire leurs propres véhicules quand leur prend l’envie de se déplacer.

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ne veulent plus voir les notables politiques ou de naissance s’approprier une grande partie du matériel agricole, des semences, des engrais au détriment des paysans laborieux qui s’échinent aux champs à longueur de journée et pour ne rien gagner à l’heure des récoltes à cause d’outils agricoles archaïques, de mauvaises semences et d’engrais en rebut enfouis dans leurs champs.

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ne veulent plus d’une Présidence de la République et de ministères qui ressemblent à la Foire Internationale de Dakar du temps de sa splendeur avec des dizaines de ministres-conseillers et d’ambassadeurs itinérants, de centaines de conseillers techniques et de chargés de mission avec des avantages matériels et financiers inacceptables dans un des pays les plus pauvres du monde. Des ambassades et des consulats qui ressemblent à des permanences du Parti. Ils ne veulent plus d’institutions de recasement (HCCT, HCDS, CESE, …) pour les compagnons des jours et des nuits d’inconfort qui veulent avoir, enfin, leur part du méchoui.

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ne veulent plus de «Le parti avant la patrie», «La fratrie avant la patrie», même pas une «gestion sobre et vertueuse». Ils veulent juste «The right person at the right place» pour conduire les affaires avec humilité, générosité et droiture.
C’est l’occasion de se féliciter de l’attitude de la plupart de nos vénérables guides religieux qui ne se sont plus prononcés sur les questions politiques depuis belle lurette, laissant les acteurs politiques s’entretuer et se réconcilier sans leurs interventions directes ou indirectes. Ils ont totalement raison. Cette posture est la meilleure pour consolider notre démocratie.

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ne veulent plus de la politicaille professionnelle sans vergogne, sans foi qui hantent tous les régimes. Un jour, ils sont verts. Le lendemain, ils sont bleus. Le surlendemain, ils sont marrons. En fin de semaine, bons calculateurs, ils s’habillement élégamment aux couleurs de l’arc-en-ciel et le tour est joué !

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ne veulent plus d’évacuations sanitaires pour les copains de coalition, les notables politiques et de naissance à l’Hôpital de la Pitié Salpêtrière, au CHUV de Lausanne. Ils veulent se soigner, ici et dans des hôpitaux de qualité égale à celui de George Washington University Hospital avec un corps médical bien formé, dans un environnement de motivation exceptionnel.

Ces femmes, ces hommes, ces jeunes ne veulent plus d’abris provisoires … finalement durables qui sont la honte de toute la classe politique de 1960 à nos jours. Ils ne veulent plus jamais de ces classes pléthoriques étouffantes pour les élèves et leurs enseignants. Ils veulent d’excellentes écoles pour les enfants du Sénégal car la dignité habite les hameaux les plus indigents et les plus éloignés comme les quartiers résidentiels de la capitale.

Ce sont ces femmes, ces hommes, ces jeunes qui crient à tue-tête : «Amadou !». «Diômaye !». Ils vous appellent car les gris-gris, l’eau bénite et les bénédictions des saints hommes et des féticheurs ont tardé à produire les effets escomptés. Vous êtes les messies ! Qu’allez-vous présenter aux sénégalais qui n’ait été proposé depuis 1974 ?

Mon cher cousin Amadou BA, mon cher Baïdy BA, cher Bayal BA, ne penses-tu que tu as brûlé toutes tes chances d’accéder à la magistrature suprême en te présentant à ces femmes, à ces hommes, à ces jeunes aux exigences de bien-être immédiates, incompressibles comme étant le CANDIDAT DE LA CONTINUITÉ alors qu’aucun des scandales évoqués par la presse nationale et internationale n’a connu un traitement diligent près des cours et des tribunaux pour fonder la vérité et que tu n’as toujours pas promis l’application systématique du «mode Préférence Nationale» au profit du Secteur Privé National dans la réalisation des travaux d’intérêt public ou l’acquisition des équipements divers pour le compte de l’état du Sénégal ?

Mon cher Baïdy BA, es-tu sûr que ces femmes, ces hommes, ces jeunes prêts à aller mourir dans les océans pour amerrir à Lampedusa, à Las Palmas ou marcher dans les déserts africains et dans les régions arides du Mexique jusqu’à ce que mort s’en suive sont réellement décidés à soutenir le CANDIDAT DE LA CONTINUITÉ ?

Cher Bayal BA, es-tu convaincu que ces familles éplorées par la perte d’un enfant ou d’un conjoint, ces maisons devenues des centres d’accueil d’handicapés physiques et mentaux, ces ménages disloqués, ces emplois perdus, ces rêves brisés, ces cauchemars qui ne quittent plus la mère de l’enfant tombé sous les balles des meurtriers dans la lutte contre les fossoyeurs de la démocratie et du mieux-vivre-ensemble veulent véritablement accorder leurs suffrages au CANDIDAT DE LA CONTINUITÉ ?

Mon cher Amadou Bayal BA, si tu étais le candidat de la cassure, de la disjonction, j’aurais voté pour toi, volontiers. Hélas !

Mon cher cousin Bassirou, mon cher Diômaye, cher Diakhar FAYE, tu as déclaré partout que tu es le CANDIDAT DE LA RUPTURE. Je te crois car les bons sérères que je connais ne volent pas, ne tuent pas, ne mentent pas, ne se dédisent jamais.

Ainsi, ce dimanche 24 mars 2024, dès l’aube, sous le ciel blafard, je serai à mon centre de vote, à la devanture de mon bureau de vote habituel pour accomplir mon devoir citoyen du jour. Je voterai pour toi si tu me promets de ne jamais te départir de ta barbe noire pas trop belle, en vérité, que les spécialistes de la communication politique te conseillent de faire tailler … «jusqu’à sa plus simple expression» chez le meilleur barbier de Dakar et si tu ne changes pas ton élocution sérèresque de digne héritier de Salmone FAYE celui qui se nourrissait de nourrissons, en ne t’exprimant pas comme les parvenus, les nouveaux riches et de la toute nouvelle noblesse qui roulent les «R» et même les «G» et les «Z».

Mon cher Diômaye FAYE, je voterai pour toi, parce que tu as juré dans toutes les localités que tu as visitées que tu ne trahiras jamais l’espoir que la majorité des sénégalais placeront en toi comme cinquième président de la république du Sénégal grand, éternel, ce dimanche 24 mars 2024, à 18:30.
Devant les peuls et les diolas, tu as fait le serment d’être le CANDIDAT DE LA RUPTURE. Rupture d’avec les pratiques mafieuses, népotistes, claniques, ethnicistes, confessionnelles, confrériques connues depuis la première alternance démocratique et consolidées, à volonté, avec l’avènement de la deuxième.

Mon cher Diakhar FAYE, CANDIDAT DE LA RUPTURE, tu nous garantis avec force que la justice sera dite chaque jour, partout et pour tous par des femmes et des hommes probes que nul et rien ne peuvent corrompre parce que ces femmes et ces hommes savent que l’œil de Dieu accède là où l’œil de l’enquêteur ou du dénonciateur ne peut voir, parce qu’ils savent aussi qu’il n’y a de puissant que le Créateur et Maître des juges et qui les attend comme on dit … au tournant de même que tous les présidents de la république.

Tu ne frapperas jamais ceux qui ne penseront pas comme toi, les paupières closes ou ouvertes comme l’avait recommandé la maraboutaille, récemment, à Diamniadio. Tu n’humilieras jamais tes adversaires parce que disposant de la force que tes partisans et tes adversaires ont mise entre tes mains pour le bien-être de tous.

Bassirou Diômaye Diakhar FAYE, CANDIDAT DE LA RUPTURE, je voterai pour toi car je suis persuadé que tu dérouleras le programme que tu as mis sous nos yeux d’alertes vigiles en faction en plus des apports fécondants des propositions de sénégalais travaillant uniquement pour que le rêve se réalise ; que les parents des martyrs fassent le deuil de leurs enfants ; que les mutilés se rendent aux travail, béquilles à l’appui, portant fièrement leurs prothèses ; que les universités rouvrent leurs portails ; que les usines se remettent en marche ; que les malfrats s’exilent ; que toutes les terres arables du Nord, du Sud, de l’Est et de l’Ouest bruissent de chants de laboureurs enthousiastes avec des équipements agricoles modernes, des semences et des engrais de qualité à suffisance ; que le patrimoine immobilier national volé, bradé soit restitué ; …

Bassirou Diômaye Diakhar FAYE, CANDIDAT DE LA RUPTURE, je ferai de toi le futur président de la république en t’ayant à l’œil même au plus profond de mon sommeil pour que tu ne tombes pas bas, très bas au cours de «la ronde des hyènes autour» … du bureau présidentiel. Elles sont nombreuses ces hyènes : la politicaille, la griotaille, la racaille-affairiste sans oublier la famille.
Ah la famille !!! Elle peut être pire que le rat des champs et le rat des villes. « Toi-même, tu sais ».

Chaque bimestre ou trimestre, je t’enverrai une lettre pour te rappeler que les diolas et les peuls ne te pardonneront jamais d’être un parjure, un renégat, d’être leur mauvais cousin dans l’exercice de ta prestigieuse fonction présidentielle.
«Bul di mosa saalit», te répète, infatigablement ton père. «Bul mosa tuuti», j’ajoute.

Au nom du pacte de sang, au nom du Seigneur des seigneurs, Bassirou travaille inlassablement pour être le bon père de la nation … sénégalaise, de la grande famille sénégalaise, le père de ce peuple béni du Dieu des peuls, des dieux des sérères et des dieux des diolas.

Mes salutations respectueuses à vous, Monsieur le Président de la République, Bassirou Diômaye Diakhar FAYE.

Yalla nala jig ! Yo male ! Yaa sam tee malong ! Emiteykann sijaki !

Dakar, le 20 mars 2024

(•) Romancier – dramaturge. Citoyen sénégalais n’appartenant à aucun parti politique, à aucun mouvement de soutien politique.

NB : Amadou BA est mon cousin à plaisanterie du fait de son patronyme, Diômaye l’est parce qu’il est un sérère.

1 Commentaire

  1. ABDOULAYE THIAM

    Très très pertinent beau texte merci d’avoir mis l’accent sur certaines dérives de certains politiciens véreux qui cultivent l’éthinicisme la séparation jusqu’à dans les contrées les plus reculées du Fouta. Des personnes qui sur le plan du développement n’ont rien comme actifs depuis des décennies et les mêmes têtes usent de tout pour alimenter des discours de haine de la calomnie de la médisance pour mieux diviser afin de conserver leurs acquis cripto personnels. Bcp ont compris que de L’est à L’ouest du nord au Sud Sénégal demeure et restera indivisible. Demain fera jour la volonté populaire fera flotter haut le drapeau du Sénégal soit pour un changement radical générationel ou restera dans la continuité de mode de gouvernance et de gestion de nos institutions et derniers publics.

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